Les problèmes du JSF (encore dénommé Lockheed-Martin F 35 ou Lightning II) continuent, et apparemment, malgré une communication savamment orchestrée, ne tournent pas dans un sens favorable.
Pour l'instant, les avions qui volent sont l'équivalent des dreamcars qui font rêver les badauds dans les salons de l'Auto : Ce sont des avions de transports très chers pour un seul passager, le pilote, et dont les évolutions sont uniquement destinées à faire croire aux bailleurs de fonds que l'engin tiendra ses promesses.
Ayant vu que mon post précédent sur le sujet avait subi, en cette mi-Janvier 2013, un regain de lecture par des gens qui risquent fort d'être concernés par les capacités aériennes de nos alliés, je me permets de revenir sur un des points de ma conclusion d'alors, car je pense que ce JSF ne tiendra pas ses promesses.
De nombreux signaux très récent (voir sur le site d'AW&ST cet article de Bill Sweetman) montrent l'inquiétude des responsables militaires américains quant à la réalisation de ce programme militaire, le plus coûteux de toute l'Histoire.
Les limites actuelles des logiciels
En dehors des problèmes aérodynamiques (quand même bizarres) et des problèmes de cohérence dans la gestion du programme, il y a un problème considérable qui est lié à l'âme même de cet avion, son très puissant ordinateur.
Une notion fondamentale manipulée par les informaticiens est la complexité algorithmique. C'est, caricaturalement, une mesure de la relation du temps de traitement des données en fonction du nombre même de ces données (temps linéaire, quadratique, cubique,... exponentiel, voir plus).
Mais, le JSF est censé savoir tout faire (peut-être pas le café, quand même).
Les gestionnaires du programme prévoit que son logiciel doit tourner autour des 26 millions de lignes de code dont 10 seulement seraient écrites (c'est déjà beaucoup, c'est même gigantesque).
Mais ce logiciel ne vise pas à réaliser un seul grand travail, mais à réaliser une quantité phénoménale de travaux différents.
Les systèmes informatiques embarqués dans les avions de combat actuels permettent d'aider les pilotes à rester dans leur enveloppe de vol, à gérer les paramètres-moteur, à toucher leur cible avec précision, à échapper aux menaces qu'ils ont détectées. Pour chaque action à réaliser, il y a une base de données dédiée.
On a pu constater que, pour autant, ils n'évitent pas la collision entre avions ou la collision avec le sol pas plus qu'ils n'interdisent certaines fausses manœuvres. La raison en est simple : L'ordinateur n'a aucun moyen de prendre le pas sur le pilote parce que notre modélisation de nos propres comportements n'est pas encore assez fine. Du coup, si le pilote réagit mal, l'avion est perdu.
Le système du JSF est annoncé capable de faire tout ce que peut faire un avion de la dernière génération, mais, en plus, de donner au pilote une vision parfaite du monde extérieur sur toute la sphère extérieure à l'avion. Evidemment, ce système informatique, unique pour 3 avions différents, est donc à même de gérer un atterrissage vertical sur un porte-hélicoptères voguant en pleine tempête. Juste pour mémoire, les pilotes Britanniques devaient justifier de 2000 heures de vol pour postuler au pilotage d'un Harriers.
C'est pourquoi, en Septembre 2012, j'avais indiqué que le JSF se heurtait probablement au mur de la complexité logicielle (software complexity), sauf que ce concept n'existant pas encore vraiment, les avancées théoriques en sont lentes.
Bien sûr, les informaticiens de Lockheed-Martin doivent travailler globalement dans ce sens-là, mais les voies qu'ils explorent ne sont pas obligatoirement garanties de déboucher sur le succès.
Et c'est à cause de ce problème que je ne crois pas un seul instant que l'engin finira par fonctionner comme annoncé.
J'ai vu que certains contributeurs de forums (où que ce soit sur la planète) sont persuadés que l'engin finira par fonctionner correctement.
C'est justement ce à quoi je crois de moins en moins : Quelque soit les moyens financiers et humains que vous investissez, vous ne pouvez pas tout faire.
La vraie solution pourrait venir des ordinateurs fondés sur l'algorithmique quantique (sur laquelle Lockeed-Martin travaille effectivement puisque la société a acheté un D-Wave One système - source Wiki en).
Ces ordinateurs, en théorie du moins, échappent à nombre des problèmes qui bloquent les ordinateurs actuels qui fonctionnent sur une logique binaire simple (ils pourraient par exemple traiter des algorithmes quantiques qui résolvent des problèmes NP, voire NP complets).
Par contre, ils ne résolvent pas les problèmes indécidables.
J'imagine (peut-être à tort, je le reconnais, cher Montaudran) que la communication entre les différents compartiments logiciels peut être supervisée par un ordinateur indépendant et hyper rapide, et j'ai la faiblesse de penser que, un jour, peut-être, ce type de problème sera résolu.
Enfin, il faudra ensuite s'assurer que les pilotes seront capables de fonctionner dans l'engin résultant. Les problèmes récents du F 22 ont démontré que ce bel engin avait du mal à fonctionner avec ce type de charge utile !
De plus, dans cette future époque - vers 2033 - la cellule du F35, conçue vers 1996, sera complètement obsolète.
Pour le temps présent, on peut certes faire voler la coque de cet avion avec des systèmes beaucoup moins ambitieux - donc dégradés - mais cela ne servira qu'a sauver la face et à vendre des engins inutiles à des politiciens corrompus.
Les risques du métier, nouvelle version
Ce doute concerne la sécurité logicielle du programme, en particulier du fait que ce sont des milliers d'entreprises situées dans une dizaine de pays qui en fabrique les organes.
La réponse du lobby pro-JSF ne tarda pas et établissait que ce bombardier furtif n'était pas plus menacé que l'avaient été le F 16 ou le F 18 en leur temps.
Le commentaire de ce grand journaliste aéronautique américain qu'est Bill Sweetman est tombé le 26 Avril 2013. Elle est pleine de bon sens et d'humour.
Il y rappelle qu'au début des années 70, d'une part Internet était un système purement militaire et purement américain, donc entièrement contrôlé. D'autre part, ces avions n'avaient rien de cyber-engins.
Le F 35, par contre, est, au moins dans les désirs de ses concepteurs, un objet totalement informatique.
Par ailleurs, l'ensemble des entreprises qui participent à ce programme constituent une "surface de vulnérabilité" incomparablement plus importante.
Mr Sweetman conclut son propos en conseillant à Lockheed-Martin de dépenser son argent dans la recherche des failles de sécurité plutôt que dans des opérations de désinformation invraisemblablement coûteuses.
savoir éviter de persévérer dans l'erreur
Lorsque j'apprenais à piloter, mon instructeur m'a fait comprendre une leçon essentielle qu'il avait dû lui-même apprendre aux USA en 1944 : La capacité de prendre la décision du demi-tour avant qu'il soit trop tard.
Cela m'a sauvé la vie trois mois plus tard lors de ma seconde navigation en solo, lorsque je suis tombé en plein sur un front nuageux qui descendait très bas et non annoncé (Météo-France était en grève).
Les USA ont perdu cette capacité de décision du demi-tour. C'est très inquiétant pour eux.