lundi 6 janvier 2020

NC 1080, VG 90, Nord 2200, chasseurs embarqués de 1950... abandonnés (Révisé 05 / 06 / 2023 * *** ***)


1950 : Résumé (très) simplifié de la Guerre Froide



{Avertissement : J'ai repris l'orthographe des noms Chinois telle qu'elle était chez nous dans les années 50-60, pas seulement parce que c'est ainsi que je l'ai lu initialement, mais surtout parce qu'elle correspond à peu près à ce que des étudiants Chinois eux-mêmes ont prononcé devant moi lorsque je leur ai demandé de le faire. 
Je suppose que l'orthographe actuelle est adaptée à la conception Anglo-Saxonne.}

Presque immédiatement après la victoire Alliée de 1945, la Guerre Froide avait déjà pris une grande importance. 

En Europe occidentale, les partis communistes de certains des pays les plus influents (France, Italie, Belgique), auréolés de leur participation (plutôt tardive) à des actions de résistance au nazisme, siégeaient dans les gouvernements en place. 

La Guerre Froide se manifestait en Chine par la lutte entre les forces de Tchang Kaï Chek (très affaiblies par des années de guerre intense contre les Japonais) et le parti communiste Chinois de Mao Tsé Toung (favorisé par les livraisons d'armes soviétiques et qui avait bien moins combattu les Japonais).

Le 12 Mars 1947, le président H. Truman avait dénoncé l'agressivité conquérante des communistes et de l'URSS en Europe. 

Peu après, le général Marshall lançait un plan visant à réduire la pauvreté en Europe Occidentale (5 Juin 1947). 

Malgré cette prise de conscience du président US, très curieusement, les Forces Armées des USA avaient continué à subir de fortes réductions (à 8% des effectifs de Septembre 1945 !).

La plupart des matériels de guerre (avions et navires) avaient été détruits ou mis en cocon, pour les plus récents.

Ainsi, sur les 128 porte-avions US existants en 1945 (!), un seul restait opérationnel en 1949

Pire encore, si l'on peut dire, le remplacement du (brillant) Secrétaire à la Défense des USA James Forrestal par Louis Johnson aboutit à un affaiblissement considérable de l'Armée des USA, quelles qu'en soient ses composantes (Terre, Air, Mer).

La défense des USA ne reposait plus que sur l'arme nucléaire transportée par des bombardiers stratégiques Convair B 36

Il faut dire que pour les grands stratèges de l'US Air Force, les porte-avions de l'US Navy induisaient des dépenses insupportables. 
Bien sûr, dans leurs discours, ces hommes paraient leurs bombardiers stratégiques de qualités extraordinaires.

Hélas, si, aérodynamiquement, le B 36 était un avion réellement très avancé, ses 6 puissants moteurs P&W de 71.5 litres de cylindrée (qui développèrent jusqu'à 3 800 Cv chacun) souffraient de très profondes difficultés de refroidissement, probablement induites par le fait que leurs hélices propulsives ne permettaient pas d'éliminer autant de calories que des hélices tractives. 

Par ailleurs, la vitesse de croisière économique de ce bombardier, inférieure à 400 km/h (!), constituait une aubaine pour tout adversaire disposant de chasseurs à réaction, fussent-ils très inférieurs aux fameux MIG 15 !


Face à ce pacifisme de fait des USA (étonnant eu égard à ce que l'on connaîtra 10 ans plus tard et jusqu'à nos jours), Staline s'imagina - logiquement - pouvoir conquérir l'Europe entière à très peu de frais par une succession de petits coups de force. 

Il commença par les pays occupées par les troupes soviétiques depuis la Victoire de Mai 1945.


Un premier coup de tonnerre ébranla l'Europe le 25 Février 1948 : Ce fut le coup de Prague (coup d'état communiste) en Tchécoslovaquie. 

Aucune force armée Occidentale n'était disponible pour faire respecter la volonté réelle des peuples Tchèque et Slovaque... 

Un second coup de tonnerre, bien plus violent, lui fit suite quand l'URSS déclencha le blocus de Berlin, le 24 Juin 1948C'était le chantage : "Vous nous abandonnez Berlin ou vous déclenchez la Troisième Guerre Mondiale".

{Rappel :  Le rapport des forces à Berlin était de 1 500 000 soldats soviétiques opposés à près de 9 000 soldats US, 7 600 soldats Britanniques et 6 100 soldats Français (soit un total de 22 700 soldats Alliés).

Ce coup de poker de Staline à  Berlin entraîna une réponse Alliée parfaitement adaptée qui réussit à empêcher le déclenchement de la 3ème Guerre Mondiale : Un énorme pont aérien fut instauré par les USA et par le Royaume Uni. 

Ce pont aérien ne devait jamais s'arrêter pour d'évidentes raisons géopolitiques. 

Du coup, le patron de cette opération inventa et imposa les célèbres règles de vol aux instruments (Instrument Flight Rules = IFR), universellement employées de nos jours et qui, depuis, ont évité énormément d'accidents aériens. 

La fréquence des atterrissages à Berlin put ainsi atteindre en moyenne un avion toutes les 30 secondes.

La France d'alors employait la totalité de sa très maigre aviation de transport au profit des opérations de la guerre d'Indochine

Cependant, en employant 19 000 ouvriers Allemands (dont 11 000 femmes), elle créa (Les Ailes du 11 Juin 1949), avec le concours d'architectes et de hauts techniciens US, le nouvel aéroport de Tegel qui put ainsi disposer de la plus longue piste en dur d'Europe (2 400 m de long). Ce travail fut réalisé en seulement 90 jours.
Pendant le même temps, les matériels et soldats US étaient de retour en Europe.

Staline fut bien obligé de reculer... 

PS: Tegel est devenu - depuis - le principal aéroport de Berlin.}



Un troisième (et formidable) coup de tonnerre fut l'explosion de la première bombe nucléaire soviétique, le 29 Août 1949.
Cette explosion démontrait que l'URSS, partie tardivement dans la course technologique à l'arme nucléaire, avait admirablement profité de ses excellents services de renseignement. 

Elle démontra aussi, que ce pays avait bénéficié du dégoût déclenché contre les gouvernants Britanniques qui avaient eu tant de mal à rejeter le nazisme jusqu'en 1941, parce que Hitler leur était apparu comme l'outil inespéré pour mettre à bas la Russie, qu'elle soit communiste ou non. 
Cette motivation Anglaise - bien plus anti-Russe que anti-marxiste - explique assez clairement à la fois pourquoi le premier ministre Stanley Baldwin signa l'accord naval Germano-Britannique de 1935, condamnant sans le savoir le croiseur de Bataille Hood.

Il explique aussi pourquoi son successeur Neville Chamberlain se précipita pour signer le répugnant traité de Munich en 1938, induisant automatiquement le pacte Germano-soviétique de 1939.



La bombe soviétique "Premier éclair" - ou RDS-1 - explose le 29 Août 1949 



Le déclenchement de la Guerre de Corée fut un nouveau et tragique coup de tonnerre de cette Guerre Froide (pas si froide que cela, vu les énormes pertes humaines des deux côtés, de l'ordre de 4 millions de morts au total, dont au moins 2 millions de civils).

Cette étape fut directement associée à la présence à Washington de l'espion Anglo-soviétique Kim Philby, ancien directeur du MI 6 (!), lequel informa Staline de la difficulté où se trouvaient les USA pour fabriquer suffisamment de bombes nucléaires. 
Il les informa également de la difficulté à mettre au point leurs bombardiers transcontinentaux B 36. 
Donc, à ce moment précis, la dissuasion nucléaire US ne fonctionnait pas.

L'offensive Nord-Coréenne, lancée par Kim Il Sung le 25 juin 1950, rencontra
 initialement un succès total.

Heureusement, les USA disposait encore d'un porte-avions de type Essex (27 000 tonnes, 98 avions), l'USS Valley-Forges (CV 45).

Mac Arthur put compter sur ce navire et sur le porte-avions Britannique HMS Triumph, le 3 Juillet 1950, pour lancer ses forces aériennes (constituées, du côté US, de Corsair et de Skyraider - protégés par des F9F Panther -) sur Pyongyang, dans les arrières des Nord-Coréens. Mais la puissance de ces deux porte-avions était encore très insuffisante pour bloquer la progression communiste : Il fallait aussi des chars, des canons et des soldats.


Avions de chasse à réaction embarqués en 1949-50

Les marines ayant de réelles capacités aéronavales étaient bien peu nombreuses en 1948, et parmi celles-ci, deux seulement étaient dotées de chasseurs à réaction, la Royal Navy et l'US Navy. 
(Les soviétiques étaient encore bien loin de dominer la notion de chasseurs embarqués.


Chasseurs à réaction de la Fleet Air Arm


Le premier avion à réaction Britannique employé par la Fleet Air Arm 
fut le de Havilland DH 100 Sea Vampire, qui apponta dès la fin de l'année 1945.

Ce chasseur à ailes droites, assez léger, se révéla facile à piloter. 
Il obtint, en conséquence, un succès commercial considérable (plus de 3 300 exemplaires vendus dans le monde).




Vampire Britanniques volant au dessus de l'Egypte


Cependant, le Vampire initial avait des performances un peu faibles (885 km/h) par rapport à ses futurs  adversaires ou concurrents.



Le Venom, qui lui succéda (1er vol le 2 Septembre 1949), avait enfin des ailes en flèche de 17.6° et disposait d'un siège éjectable

Grâce à une motorisation amélioré (réacteur de Havilland Ghost de 2 000 kg de poussée), il gagnait 150 km/h en vitesse sur son prédécesseur.

Le Sea Venom en fut la version embarquée.

Long de 11.15 m, il avait une masse de 4 200 kg à vide et de 6 500 kg au décollage.

L'envergure des ailes atteignait 13.06 m pour une surface totale de 25.90 m². La charge alaire était donc de 277 kg/m².

La vitesse de pointe était de 925 km/h au niveau de la mer et de 960 km/h en altitude.

Il pouvait monter à 12 000 m.

Il était armé de 4 canons HS 405 de 20 mm.

Il fut construit en 1 400 exemplaires 
(dont 120 pour notre Marine Nationale par la SNCASE).



Le Supermarine Attacker fut un des premiers chasseurs à réaction construits pour un usage marin.

En fait, il résultait de l'utilisation de l'aile du Spitful sur une cellule de chasseur à réaction. Il reçu d'ailleurs le surnom de Jet Spitful.

Il répondait à une spécification de 1944 et fit son premier vol à la fin de Juillet 1946. 

Long de 11.43 m, il avait une masse de 3 826 kg à vide et de 5 340 kg au décollage.

Sa voilure, curieusement dépourvue de flèche, avait une envergure de 11.25 m et une surface de 21 m².
La charge alaire de 254 kg/m² permettait une maniabilité très correcte.

Son réacteur Rolls-Royce Nene avait une poussée de 2 200 kg.

La vitesse maximale était de 950 km/h et, à sa vitesse de croisière, il pouvait parcourir 
950 km.

Sa vitesse ascensionnelle était donnée pour 32 m/s, le plafond étant donné pour 13 700 m.

L'armement consistait en 4 canons Hispano-Suiza Mk V.

Ce chasseur entra en service en Août 1951 et fut construit en 146 exemplaires pour la FAA et en 36 exemplaires (dé-navalisés) pour la Pakistan Air Force.




Supermarine Attacker - 


Hélas pour l'Attacker, son concepteur lui avait conservé un train classique qui rendait les décollages plutôt sportifs depuis un pont de porte-avion, même si le poste de pilotage très avancé lui conférait une excellente visibilité. 

L'Amiral Barjot (Les Ailes, 04 / 06 / 49) avait reçu des Britanniques l'information que le train classique était supérieur au train tricycle pour le service sur porte-avions (très probablement  parce que les avions se freinaient plus vite), mais la faible durée de vie opérationnelle de l'Attacker tout comme son remplacement par le Sea Hawk racontent une toute autre histoire : Les pilotes récemment formés préféraient sans aucun doute le gain de visibilité et de contrôlabilité des trajectoires apportés par le train tricycle.

L'avion fut construit à 182 exemplaires de série et 3 prototypes.

L'Attacker fut retiré du service de la FAA Britannique en Août 1954, après 3 ans de service actif et sans 
jamais avoir été confronté à l'ennemi.

Cependant, on ne lui compte que 3 accidents mortels (sur un total de 4), ce qui démontre que si ses pilotes n'en étaient pas fanatiques, ce chasseur avait sans aucun doute des caractéristiques de vol très bonnes

Par contre, sa fiabilité n'était que très moyenne, ce qui correspondait à la fois à un réacteur encore très immature, et à la confrontation des avionneurs (et de leur sous-traitants) avec les contraintes considérables introduites par le vol à des vitesses proches de 1 000 km/h.

La comparaison avec son successeur (voir ci-dessous) montre que les performances des deux avions étaient très proches et, curieusement, qu'aucune amélioration autre que le train tricycle ne permet de comprendre le relatif succès de ce dernier.



Son successeur fut le Hawker Sea Hawk dont le développement était issu du Fury à moteur à pistons RR Griffon de 1944.

Dépourvu d'ailes en flèche, il employait enfin un train tricycle d'emploi bien plus facile.

Long de 12.09 m, ce chasseur pesait 4 200 kg à vide et 6 000 kg au décollage.

La voilure avait une envergure de 11.89 m et une surface de 25.83 m².
La charge alaire atteignait donc 232 kg/m2.

Le réacteur Rolls-Royce Nene 103 donnait 2 300 kg de poussée.

Au niveau de la mer, ce chasseur passait les 965 km/h. 

Son autonomie atteignait 770 km.

Le taux de montée atteignait 29.0 m/s et le plafond pratique était de 13 504 m.

Cette légère baisse de performance par rapport à l'Attacker doit être imputée à sa masse supérieure de 660 kg, malgré un moteur un peu plus puissant (mais surtout plus fiable).




Hawker Sea Hawk de la marine Néerlandaise - les entrées d'air et, surtout, l'expulsion des gaz brûlés se faisaient très près du réacteur unique, ce qui à cause de la courbure imposée aux conduit d'entrée comme à ceux  de sortie,  pouvait entraîner une perte de rendement non négligeable


Le Sea Hawk était de 15 km/h plus rapide que l'Attacker, mais il perdait quelques m/s en vitesse ascensionnelle, 200 m de plafond pratique  et, ce qui était opérationnellement plus ennuyeux, 170 km d'autonomie. 

La mise au point aérodynamique s'étala sur une assez longue période mais l'avion parut suffisamment fiable pour pouvoir voler jusqu'à la fin des années 60. 

Il vit le feu contre l'Egypte de Nasser pendant la crise de Suez. 

Pendant la Guerre de 1965, entre l'Inde et le Pakistan, il se comporta très brillamment aux mains des pilotes de la marine Indienne.



Les chasseurs à réaction de l'US Navy

Le tout premier chasseur à réaction de l'US Navy fut le McDonnell Phantom (pas celui de la guerre du Vietnam, qui fut le deuxième du nom !). 

Ce biréacteur à train tricycle, comme les deux chasseurs Britanniques, avait des ailes dépourvues de flèche

Ses réacteurs Westinghouse XB-2B de faible puissance unitaire (710 kg de poussée) limitaient ses performances à 771 km/h à 9 000 m et sa vitesse ascensionnelle à un peu plus de 20 m/s. 

Son armement était de 4 mitrailleuses de 12.7 mm, ce qui était devenu totalement insuffisant. 

Il avait fait son premier vol le 26 Janvier 1945, était devenu opérationnel en Août 1947 et avait commencé à être retiré en 1949.

Cependant, l'US Navy avait bien compris que la technologie des "jets" évoluait extrêmement rapidement. 

Elle commanda donc à McDonnell un dérivé plus puissant comportant une partie des perfectionnements qui manquaient au Phantom. 



Le McDonnell Banshee fut donc doté d'un siège éjectable, de l'air conditionné, d'un cockpit pressurisé et son armement comportait des canons de 20 mm à la place des mitrailleuses de 12.7.

Le Banshee fit son premier vol le 11 Janvier 1947 et entra en formation 18 mois plus tard.



McDonnell Banshee (pendant la Guerre de Corée) - Les tuyères des réacteurs qui sortent dans les Karman sont étonnantes.



Long de 14.68 m, ce chasseur avait une masse de 5 980 kg à vide et de 9 531 kg au décollage.

La voilure avait une envergure de 12.73 m et une surface de 27.3 m².

La charge alaire atteignait donc 350 kg/m².

Ses moteurs étaient deux 
Westinghouse J34-WE-34 de 1 450 kg de poussée chacun.

 La vitesse maximale atteignait 925 km/h au niveau de la mer.

L'autonomie était de 2 762 km en convoyage, mais le rayon d'action de combat (Chasse) était de 534 km à la vitesse de croisière de 742 km/h.

Le plafond pratique était de 14 200 m avec une vitesse initial de montée de 30 m/s (on trouve aussi 37 m/s)

Le Banshee put réaliser des vols de reconnaissance et certains exemplaires virent leur structure renforcée pour pouvoir emmener une bombe nucléaire (soit une Mk VII de 750 kg, soit une Mk VIII de 1465 kg).

Bien que ce chasseur ait participé à la guerre de Corée, il n'y décrocha aucune victoire sur les avions soviétiques, qui étaient plus rapides que lui à partir de Novembre 1950 à cause de l'arrivée des MIG 15, qui étaient, surtout, considérablement plus maniables. 

Cependant, il ne souffrit que de 3 pertes et uniquement face à la DCA soviétique (?), ce qui, si c'est vrai, était déjà remarquable. 

Il fut construit à plus de 900 exemplaires pour l'USN, l'USMC et la RCN et les derniers d'entre eux sortirent des effectifs en Septembre 1962.



Le Grumman Panther apparut dans la même période au sein de l'US Navy.  

Conçu dans la seconde moitié de l'année 1946, il fit son premier vol le 21 Novembre 1947. .
Il se montra un tout autre chasseur.

L'appareil était long de 11.84 m.

Sa masse était de 4 600 kg à vide et de 7 460 kg au décollage.

L'envergure de ses ailes était de 11.58 m et leur surface totalisait 
23.23 m2.    
La charge alaire était donc de 321 kg/m².

Le réacteur Pratt & Whitney J42-P-6A, version US du Rolls-Royce Nene, délivrait une poussée de 2 800 kg.

La vitesse de pointe était de 932 km/h à 1 500 m.


La vitesse de croisière était de 774 km/h et l'autonomie atteignait 2 100 km (avec réservoirs auxiliaires).

Le plafond pratique atteignait 13 600 m et le taux de monté initial était de 25.9 m/s.



Grumman F9F (pendant la Guerre de Corée) -

L'emploi du Panther sur porte-avion fut validé en Septembre 1949.

Ce chasseur entra donc directement dans la Guerre de Corée. 

Il s'y illustra par 78 000 sorties, que ce soit pour de l'appui-feu près du sol (y compris face à une DCA intense) soit pour des patrouilles de chasse. 

Les premiers combats aériens furent réalisés face à des Yak 9U, mais, à partir de Novembre 1950, il se heurta à des MIG 15 dont il triompha 7 fois (au prix de 2 pertes).

Il s'y comporta donc plus qu'honorablement.
Ainsi, dans un combat tournoyant qui eut lieu le 18 Novembre 1952, le lieutenant Royce Williams du VF-781, issu de l'USS Oriskany, mena un combat épique seul contre 6 MIG 15
Ce combat dura 35 minutes (!). Williams réussit à abattre 4 de ses adversaires (victoires confirmées 40 ans plus tard par la Russie...) et se posa ensuite sur son porte-avions après avoir été touché 263 fois. 

Son chasseur était bon pour la casse mais il avait démontré les capacités de son pilote et sa propre solidité face au feu ennemi ! 

Il faut souligner également que la masse au décollage de ce chasseur tenait compte de la quantité de carburant pour une autonomie augmentée de 1 300 km par rapport au Sea Hawk Britannique. 

Cependant, le Panther avait montré quelques faiblesses.

Grumman fut donc conduit à en développer un dérivé, le Cougar, équipé enfin d'ailes en flèche de 35° et qui, de ce fait, pouvait voler à 1052 km/h




Un autre appareil issu d'un constructeur Américain apparut avec un certain retard, le Vought F 7- U Cutlass
Ce projet avait pourtant démarré le 1er Juin 1945. 

Il s'agissait d'une aile volante en flèche (38°) qui devait beaucoup aux travaux Allemands de la fin de la guerre.
L'engin était plus grand et plus lourd que tous les avions précédemment décrits. 

Il fit son premier vol le 29 Septembre 1948. 
Les essais furent très chaotiques, les trois prototypes disparaissant les uns après les autres dans des accidents (dont l'un fut malheureusement fatal). 

Le futur astronaute Walter Schirra en parla comme d'un "faiseur de veuves".

Un pilote d'essai se rendit compte, alors que son Cutlass tombait à cause d'un décrochage et lui-même avait perdu tout contact avec son manche à balai, que son avion s'était rétabli tout seul.
Les instructions de reprise de contrôle habituelles étaient donc erronées pour cet avion 

Voilà qui pouvait expliquer certains accidents, mais pas tous.

Par contre, l'avion était une bonne plateforme de tir, manœuvrant, amusant à piloter et solide. 
Son évidente maniabilité explique qu'il ait été employé pour réaliser des vols solo lors de démonstrations des Blue Angels (patrouille acrobatique de l'US Navy).

Les données relatives à la version de série F7U-3 viennent de The Complete Book of Fighters (W. Green &  G. Swanborough, 1994). 

Long de 13.13 m, sa masse atteignait 8 280 kg à vide et 14 350 kg au décollage.


                                                                                       

Vought F7 U Cutlass - Un avion très original, doté d'une excellente visibilité.


La voilure avait une envergure de 12.09 m et une surface alaire de 46.08 m², donc une charge alaire au décollage de 310 kg/m².

Les 2 réacteurs Westinghouse J 46-WE 8 choisis délivraient chacun une poussée de 2 086 kg à vide et de 2 770 kg, post combustion allumée.

La vitesse maximale atteignait 1 120 km/h (Mach 0.91) au niveau de la mer et 1 094 km/h à 3 050 m (Mach 0.93).

Le temps de montée à 6 100 m était de 5' 48" alors que 10' 12" étaient nécessaires pour monter à 9 150 m.

Le plafond pratique culminait à 12 400 m.

L'armement comportait 4 canons de 20 mm M3.

On reprocha toujours au Cutlass le manque de puissance de ses réacteurs.

Néanmoins, cet avion connut 78  accidents qui représentaient 25 % de la flotte disponible. 

Ce taux d'accident traduisait à l'évidence un problème de qualité de construction, et de nombreux problèmes dans la formations des pilotes.

Entré en service en 1954, il en sortit en 1959 et ne connut, à ma connaissance, aucune action de combat.




La France de 1945 à 1948

En 1946, la France était ruinée à cause :

  • du pillage systématique de ses ressources par les Allemands, 
  • nos côtes étaient très largement minées par les mêmes et 
  • nos usines avaient été largement bombardées par les Alliés,
  • Nous avions nous-mêmes saboté nos voies de communications : Tout était à reconstruire. 

D'énormes efforts furent demandés à la population pour reconstruire les millions d'habitations nécessaires comme pour relancer la production de charbon et d'acier.

Comme la France était un pays colonial, elle avait aussi exigé un effort de ses colonies.

Nos dirigeants n'avaient donc absolument  pas compris que notre pays était un des objectifs de la Guerre Froide. 

Ces nouvelles exigences, sans aucun accompagnement vers des avancées de souveraineté, favorisèrent la montée des nationalismes, auxquels furent opposés des troupes transportées par voie maritime.

En 1945, la Marine Française était en lambeaux : Une bonne partie de ses meilleurs navires de surface se trouvaient au fond du port de Toulon et les chantiers Français n'étaient pas au mieux de leur forme. 

Les Italiens avaient bien essayé de récupérer à Toulon ceux de nos navires qui n'avaient été que coulés. Une fois en surface, une remise en état par nos propres soins aurait été possible.

Las, les bombardiers Alliés étaient intervenus mécaniquement le 18 Août 1944, trois jours après le débarquement Franco-Américain de Provence, pour les renvoyer définitivement au fond de l'eau d'où les Italiens les avaient sortis. 

{Il y a de quoi se poser des questions sur la motivation des décideurs : 
  • Ces navires constituaient-ils réellement une menace pour les Alliés ? La réponse est évidente : Absolument pas ! 
  • Leurs canons, quand ils n'avaient pas été découpés au chalumeau, étaient nécessairement très oxydés par deux ans d'immersion totale, les directions de tir étaient à refaire entièrement et les moteurs n'étaient pas en meilleur état. 
  • L'ensemble des structures étaient à rénover (au moins deux ans de travail).
  • Tels quels, ces navires remis à flot pouvaient-ils bloquer l'emploi du port pour y faire passer le ravitaillement allié ? 
    • Certainement non, car il était bien plus aisé de les déplacer tant qu'ils restaient en surface que lorsqu'ils étaient posés au fond de l'eau, constituant alors des récifs peu visibles.  
  • La France de De Gaulle constituait-elle une menace pour les Alliés ? 
    • De Gaulle ne manifestait aucune agressivité contre les USA,
    • la situation industrielle et économique catastrophique de notre pays interdisait toute offensive sérieuse contre qui que ce soit, sauf contre l'Allemand, en étant ravitaillé en tout par les USA.    
    • Les 1 900 000 prisonniers Français bloqués en Allemagne depuis Juin 1940 représentaient autant de forces productives perdues pour le pays, aussi bien sur le plan agricole que sur le plan industriel.
    • De nombreux ports Français, encombrés d'épaves enchevêtrées et de mines encore actives, étaient encore totalement inefficaces.                                                 
  • Par contre, il est probable que, dans le cerveau très compliqué (= malade) du président F.D. Roosevelt, De Gaulle représentait, bizarrement, un obstacle à ses propres projets d'hégémonie mondiale (cf. Mon père m'a dit, par Elliott Roosevelt). 
    • Le président US voulait imposer :
      • Un gouvernement Américain (AMGOT) en France, pour transformer notre pays en dominion des USA, ce qui n'était envisagé pour aucun autre pays d'Europe.
      • une monnaie à cours forcé. 
      • Cette atteinte sans précédent à notre souveraineté nationale entraîna une réaction violente de tous les acteurs politiques Français, mais en particulier de De Gaulle, et explique sa méfiance vis à vis de l'OTAN comme du Machin (= l'ONU)...
      • Cela explique aussi que Churchill - très conscient du voisinage de nos deux nations - ait imposé aux USA que la France soit présente à la reddition de l'Allemagne, qu'elle ait une zone d'occupation dans ce pays et qu'elle partage l'occupation de Berlin.}

Certesles Américains avaient accepté
 (mais tardivement) :
  • de rénover le Richelieu en augmentant qualitativement et quantitativement sa DCA et ses moyens de détection
  • de moderniser le croiseur de 7 500 tonnes Montcalm usé par 4 années d'un service de guerre le plus souvent intensif.
  • Le sous-marin Casabianca de 1 500 tonnes fit aussi partie de ce lot (il y perdit alors malheureusement l'essentiel de ses énormes qualités hydrodynamiques en plongée au profit d'une DCA utile uniquement lorsqu'il était au mouillage ou en surface), emploi que la guerre ne lui avait que très peu vu pratiquer ! 

Alors que les USA disposaient eux-mêmes de 128 porte-avions (!), ils refusèrent tout net de transformer en porte-avions notre cuirassé Jean-Bart,  qu'ils avaient massacré à quai à Casablanca, pendant l'opération Torch de Novembre 1942.

Il ne s'agissait pourtant en aucun cas d'un problème financier pour les USA qui n'avaient pas barguigné pour reconstruire certains des cuirassés archaïques de la classe West Virginia coulés à Pearl Harbor le 7 Décembre 1941, alors même qu'ils étaient déjà totalement périmés !  

En 1943, le Jean-Bart, lui, n'était en rien périmé !

Non, il s'agissait juste d'un problème politique : La France possédait alors un gigantesque Empire Colonial que les USA voyaient seulement comme un marché inadmissiblement captif de la France et non des USA. 
Il fallait que cela change le plus vite possible et à leur seul profit : Le livre d'Eliott Roosevelt, cité précédemment, le fait clairement comprendre

De nos jours (fin 2019), les USA ont bien ouvert l'Afrique à d'autres concurrents que nous, mais les vrais gagnants de cette opération n'ont pas été les USA, mais l'Arabie des Saoud, le Japon, les deux Corée et, surtout, la Chine.


La situation dans les colonies Françaises 

Lorsqu'un pays dispose d'une certaine puissance, il s'arrange pour disposer de nombreuses colonies. Inutile de remonter aux Grecs, aux Perses, aux Carthaginois ni aux Romains ! 

Ce furent les cas :
  • des Arabes puis des Turcs (dont l'empire s'étendit de la Mongolie et de la Chine à l'Est à la frontière Marocaine et aux Balkans à l'Ouest), 
  • des Suédois (dont la Russie fut une colonie qui s'émancipa sous l'influence d'un clan Suédois, les Varègues), 
  • des Espagnols (depuis les deux continents et les îles d'Amérique à l'Ouest jusqu'aux  Philippines à l'Est),
  • du Portugal (du Brésil à l'Angola, en passant par les îles du Cap Vert).
  • de l'Angleterre (des territoires de l'Amérique du Nord à l'Inde, sans compter l'Irlande du Nord),
  • puis de la Russie des Tsars, qui colonisa de la Finlande et la Biélorussie à l'Ouest jusqu'à la côte Nord-Est de l'Asie et l'Alaska en Amérique du Nord, 
  • du Japon (de la Corée à Formose, devenue Taïwan), 
  • puis de l'URSS (Ukraine d'abordpuis pays Baltes en 1939, puis RDA, et tous les pays dits de l'Est jusqu'en 1991), 
  • mais aussi des USA, à partir de la guerre Hispano-Américaine de 1898 des Philippines à l'Ouest jusqu'à Cuba à l'Est, 
  • et c'est actuellement le cas de la Chine communiste (avec une apparente totale innocence).
  
L'anticolonialisme ne peut donc être revendiqué par aucune nation sur notre planète Terre
Certes, en 1945, on parlait du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, base du traité de Versailles (1919).

Beaucoup d'états ne les respectaient pourtant pas, comme l'URSS (tentative de recolonisation de la Pologne, puis de la Tchécoslovaquie 1947, écrasement du soulèvement de la Hongrie 1956, re-Tchécoslovaquie 1968, la Chine communiste (Corée 1950) et les USA (problème du peuple palestinien, coup d'état en Iran en 1953).

La base du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes repose à 90% sur la volonté d'un futur colonisateur de remplacer un colonisateur qu'il juge plus faible.

Ainsi, la moindre défaite d'un colonisateur (en particulier si elle survient sur son propre territoire) entraîne logiquement deux conséquences totalement connexes : 
  • Le renforcement des oppositions internes à la colonie (qui existent toujours) à son pouvoir colonial,
  • La convoitise de toutes les puissances extérieures pour prendre toute place  devenue vacante. 

Pire, encore, pour la France de 1945 (mais inévitablement), la stratégie de la guerre anti nazie conduite par nos Alliés avait imposé rationnellement des étapes successives dont les premières se situèrent dans nos colonies.

Par contre, la partie décisive de la Seconde Guerre Mondiale allait obligatoirement se jouer sur notre territoire national.

Si vous n'en êtes pas convaincu, regardez une carte de l'Europe : 
  • Débarquer en Norvège n'aurait vraiment rien eu d'évident car c'eut été comme débarquer au beau milieu de la Suisse, les côtes de ce pays étant la plupart du temps très abruptes, ce qui limitait les atterrages à quelques zones bien connues où l'Allemand n'aurait pas manqué de nous attendre. 
    • En outre, il eut fallu compter avec des températures bien plus basse qu'en France 
    • avec, en plus, la nécessité de traverser le Sund pour venir sur le territoire même du Reich de Hitler.
  • Débarquer dans les îles de la Frise aurait signifié débarquer deux fois, ce qui était possible mais relativement compliqué, surtout pour transférer le matériel puissant donc lourd. Seule l'île de Sylt disposait d'une voie (alors unique) de chemin de fer la reliant au continent (depuis 1928).
  • Débarquer une armée impose d'atterrir sur des côtes stables et au milieu de populations favorables aux hommes qui débarquent.
  • Le choix de la Côte Normande puis celui de la Côte d'Azur confirment parfaitement, en outre que les Alliés savaient bien qu'une très grande majorité de Français rejetait sans équivoque l'occupation Allemande contrairement à ce que prétende les Anglo-Saxons

Parmi ces étapes, certaines étaient parfaitement logiques (Opération Torch, Novembre 1942, Overlord, Juin 1944, Dragoon, Août 1944).

Certains autres débarquement furent inventés de toutes pièces pour des raisons bien peu claires, comme la prise de Madagascar par les Anglais en 1942 (opération Ironclad).

Dans ce dernier cas, la menace Japonaise n'existait pas du tout : la preuve en est que ni la Réunion ni l'île Maurice ne furent touchées par la guerre, alors même qu'elles étaient toutes les deux bien mieux placées comme point de départ d'une invasion de l'Australie

Il est vrai que, à la suite d'une demande Allemande, trois sous-marins Japonais vinrent ferrailler à Diégo-Suarez avec les Anglais (sans résultat probant), plus de 3 semaines après leur débarquement !

En réalité, il s'agissait probablement d'une volonté délibérée d'affaiblir notre empire colonial. Mais, en agissant ainsi, nos brillants alliés Britanniques créèrent des brèches dans leur propre empire colonial : Bien fait !


D'un autre côté, en Afrique du Nord, l'opération Torch se fit de vive force bien que les Gaullistes comme nombre des autorités locales étaient déjà favorables aux Américains

D'accord, Roosevelt tenait absolument à entraîner ses troupes avant qu'elles se trouve face à l'Afrika Korps qui terrifiait alors les soldats Britanniques. 

Une série d'affrontements face à des soldats Français qui, certes, savaient se battre mais qui étaient dépourvus de matériel et de véritable volonté de combattre les Américains, donc relativement faciles à défaire : C'était réellement formateur pour ses soldats, mais aussi plus confortable (sauf pour nous). 

Cela coûta environ 2 000 morts Français et un nombre de tués moindre mais, malgré tout,  de même ordre de grandeur du côté Anglo-Américain. 

En Afrique du Nord Française, les membres des forces de l'Axe que l'on pouvait voir  étaient très majoritairement des officiers administratifs chargés de contrôler notre désarmement (mais, sans aucun doute, il y avait aussi des agents Allemands et Italiens qui voulaient instaurer l'autorité de leurs pays sur nos colonies). 

Par contre, Torch déclencha, en riposte, une invasion Allemande de la Tunisie que nos moyens locaux, très fortement diminués par le débarquement Allié, furent incapables de contrer suffisamment longtemps.

Ce débarquement Allemand retarda le débarquement Allié en Sicile de 6 mois.

Le débarquement Allié à Oran fut donc, me semble-t-il, une erreur stratégique majeure
Déjà, à cet endroit précis, la participation Britannique, en ravivant les souvenirs de Mers el-Kébir, pouvait difficilement se faire pacifiquement.

Par contre, un débarquement plus à l'Est de l'Algérie, par exemple du côté de Bône - actuelle Annaba - aurait aidé à verrouiller la Tunisie, empêchant l'Afrika Korps de revenir facilement en Sicile.


La Marine Nationale face aux guerres coloniales

Dès 1939, l'Amiral Raoul Castex, fondant son raisonnement stratégique sur une analyse minutieuse des données géopolitiques, proposait de donner l'indépendance à l'Indochine toute entière, de même qu'à la Syrie et au Liban pour nous faire des alliés (ce qui lui valu une mise à la retraite immédiate !).

Le refus de cette très brillante proposition fit que l'Indochine devint un cas particulièrement compliqué pendant la Guerre. 

Après trois années très relativement tranquilles (les Japonais se contentaient de diriger en sous-main), une armée Japonaise vint s'installer ouvertement en 1945, faisant prisonniers de nombreux soldats et officiers Français

La Chine Alliée (celle de Tchang Kaï Chek, car celle de Mao Tsé Toung s'accommodait en réalité très bien des Japonais), et les Britanniques tentèrent de chasser cette armée Japonaise, avec l'appui des Vietnamiens. Ils y réussirent, mais partiellement.

Evidemment, toutes ces armées laissèrent sur place des agents pour veiller à ce que nous ne puissions plus reprendre pied sur place. 

La guerre d'Indochine fut menée par le Viet Minh communiste de Ho Chi Minh qui voulait l'indépendance de l'Indochine par rapport à la France.

Son but réel était de créer une dictature comparable à celle de Staline en URSS. On vit d'ailleurs, à la fin de la Guerre du Viet Nam, à quel point ce régime fut génocidaire !

Bizarrement, nous sommes pourtant parvenus à  reprendre pied sur place - pour quelques années - probablement parce que ces diverses parties se détestaient cordialement entre elles. 

Notons cependant qu'au moins 5 000 soldats Japonais très expérimentés furent enrôlés pour entraîner et mener au combat les troupes du Viet Minh contre les nôtres. 

On peut se poser la question de quel aurait été le sort des insurgés sans cette colonne vertébrale militaire Japonaise hyper-entraînée


Reconquête (?)

La IVème République, dont les édiles se délectaient indéfiniment des subtiles négociations politiciennes ne sut pas trouver la solution la meilleure pour notre pays. 

A cause de cette somme d'incompétences, nous perdîmes nombre de combattants d'exception dans le traquenard Indochinois

Si on consulte la carte de l'Indochine ci-dessous, on voit que la plus grande partie de ce territoire est à moins de 200 km de la mer (Mer de Chine et Golfe du Tonkin). 
Par contre, la distance entre Saïgon et Hanoï, de l'ordre de 1 150 km, rendait illusoire tout appui tactique depuis le Sud vers le Nord.

Cela signifie que la couverture aérienne d'éventuelles opérations militaires imposait absolument l'emploi de porte-avions.

Mais, en 1945, la France n'en a aucun : Le Béarn, prématurément vieilli par son long séjour aux Antilles et très mal refondu aux USA, fut relégué au rôle de transport d'avions, comme entre 1939 et 1940.

Nous avions d'ailleurs bien peu d'avions : Quelques fragiles Seafire et quelques Dauntless.




Carte de l'Indochine copiée par moi sur le site donné en lien - La frontière avec le Siam (=Thaïlande) est un large trait de couleur bistre. L'essentiel des reliefs se trouvent près de la côte Est du pays et dans le Nord.




En 1946, les Britanniques nous louèrent le porte-avions léger (14 000 / 18 000 t) Colossus, que nous avons fini par acheter en le rebaptisant Arromanches. 

Pouvant emmener 30 avions ou 40 hélicoptères, ce navire permit, au moins, de former la base d'une nouvelle Aéronavale embarquée avec des pilotes compétents.

Mais, construit aux normes civiles (= marchandes) il aurait eut beaucoup de difficultés à résister à de vraies attaques d'artillerie (même par des canons de croiseurs légers). 

Adapté uniquement aux guerres asymétriques, il en fut vendu 11 exemplaires à divers pays, essentiellement du Commonwealth !

En attendant mieux, "La Royale" décida de fonctionner avec ce porte-avions. 

Cela signifiait que l'essentiel de l'appui aérien allait être réalisé depuis des aérodromes terrestres, nos avions, bien peu nombreux, partant donc au vu et au su de l'ennemi... 
Comment, alors, bénéficier d'un effet de surprise ?


Au moment où la Guerre de Corée fut déclenchée, certains militaires US de haut rang comprirent enfin - avec 5 ans de retard - que notre Guerre d'Indochine était totalement connexe de "leur" guerre de Corée. 

Cela débloqua la livraison d'avions de combat relativement anciens mais toujours efficaces (Hellcat, Bearcat, Avenger) et de deux petits porte-avions d'escorte (Lafayette et Bois Belleau). 
C'était évidemment bien trop tard. 
Un peu plus tard, une bonne partie de nos dépenses militaires furent même financées par les USA.

La bataille de Dien Bien Phu, à 500 km du Golfe du Tonkin, est l'exemple parfait de la bataille à ne jamais livrer

Après cette défaite, notre président du conseil - Pierre Mendès-France - négocia brillamment avec Hanoï l'instauration d'un cessez-le-feu qui dura jusqu'au déclenchement de la Guerre du Vietnam par les USA.

Certains porte-paroles US accusèrent alors notre pays d'avoir plié devant le communisme.

C'est d'autant plus ironique que les USA finirent eux aussi par plier devant le communisme.
Cette fois, pour eux, cela prit tous les aspects d'une déroute honteuse.


"La Royale" de 1945 face à son avenir

Le modeste inventaire qui précède montre qu'au moment où nos ingénieurs commençaient à concevoir leurs chasseurs embarqués, les marines alliées comptaient encore très solidement sur les ailes droites, comme l'aérodynamicien US von Karman l'avait lourdement préconisé vers 1936. 

Ce furent les exploits des MIG 15 entre 1951 et 1952 qui imposèrent les ailes en flèche à toutes les aviations du Monde. 



Les chasseurs proposés

{Sources : Nieuport 1909-1950, par L. Rosenthal et al.Docavia #38 Les avions Français, I - Chasse - Assaut, par J. Cuny, Docavia # 28 ; Fanatique de l'aviation ; Les Ailes }


Après qu'un prototype de Sea Vampire (destiné à la FAA) se soit posé sur le porte avion HMS Ocean le 3 Décembre 1945, la "Royale" décida de lancer un programme de chasseur à réaction qui fut publié le 3 Juin 1946.

Trois chasseurs différents furent proposés par 3 sociétés nationalisées. 

Ces chasseurs avaient tous, ab initio, des ailes en flèche et un train tricycle.

Pour des raisons inexpliquées, nos décideurs commandèrent 3 exemplaires à l'Arsenal de l'Aéronautique, un unique exemplaire à Aérocentre et un unique exemplaire à la SNCAN.
On peut difficilement expliquer le parti pris en faveur d'Arsenal pour un avion embarqué, les seuls avions embarqués opérationnels modernes de 1940 ayant été les Nieuport 40, 401 et 411.



Premier à voler, le Nieuport NC 1080 était l'œuvre de l'ingénieur Pillon (père des bombardiers en piqué embarqués Loire-Nieuport 40, 401, 402, 411 et 42).

Il était toujours entouré par l'ancien bureau d'étude Nieuport au sein d'Aérocentre (ex-SNCAC, ex-SNCAO).

Long de 12.87 m, il avait une masse à vide de 5 402 kg et de 6 951 kg au décollage.
(données du CEV in Prototypes de l'Aviation Française 1945-1950de J.C. Fayer, chez E-T-A-I, 2002

La voilure avait une envergure de 12 m et une surface de 28.40 m², assurant une charge alaire de 244 kg/m². 


Son épaisseur relative était de 10% et elle présentait une flèche de 22°30' à 25% des cordes.
Elle était prévue pour se replier électriquement.

Le moteur Rolls-Royce Nene délivrait 2 270 kg de poussée.

Son système hypersustentateur, dû à l'ingénieur Pierre Lemoigne (qui allait inventer, dix ans plus tard, le parachute ascensionnel), était particulièrement sophistiqué. 

Ce système servait d'aérofrein, mais, en plus, il contenait des destructeurs de portance (spoilers) initialement destinés à améliorer le gauchissement à toutes les vitesses. Il était fondé sur une succession de 3 volets à fente (Fowler).




Dispositif Lemoigne - d'après Les Ailes du 24 Déc. 1949



{Ce système sera repris en grande partie par Louis Bréguet et ses ingénieurs pour les Br 940 de transport à voilure soufflée qui furent caractérisés par leurs décollages ultra courts (moins de 200 m) et leur très grande maniabilité à très basse vitesse.}






Plan 3 vues du NC 1080 - 



Le Nieuport NC 1080 commença ses premiers roulements avec Fernand Lasne à Toussus-le-Noble, le Samedi 27 Mai 1949. 

Le surlendemain, le Lundi 29 Mai, lors d'un autre essai de roulement avec le même pilote, Les Ailes du 4 Juin suivant nous rapportent :
"Il a continué... et a même décollé avec une extraordinaire aisance. 
Lasne a déclaré qu'il ne l'avait pas fait exprès et qu'il s'était même empressé de le ramener au sol, pour ne pas transgresser la règle convenue. 
Le député-aviateur Pierre Clostermann assistait à ces essais.
Le NC 1080 a, depuis, été démonté pour gagner, par la route, le terrain de Réau [Melun, NDLR] - Villaroche où Lasne tentera incessamment le premier vol."

Il fallut en réalité plusieurs semaines pour réaliser le premier vol parce que les ingénieurs de la SNCAC préférèrent que leur avion vole avec son train d'atterrissage définitif, à la place du train fixe employé jusque alors (les Ailes du 9 Juillet 1949).

Le NC 1080 fit son premier vol officiel le 29 Juillet 1949, étant prêt nettement avant ses deux concurrents (les Ailes du 6 Août 1949).

Lasne s'aperçut alors que la maniabilité en virage avec le système des seuls spoilers était problématique (en particulier aux basses vitesses utilisées à ce stade).

Beaucoup d'écrits anciens ont mis en cause l'ensemble du système Lemoigne, allant jusqu'à dire que l'avion ne virait pas du tout. 

Cette façon bien particulière de rapporter les choses semble avoir été un argument employé par les partisans de la destruction de la SNCAC (comme le ministre Paul Ramadier, ci-devant inventeur de la vignette automobile en 1956).

Cela fut illustré en disant que les pistes de Melun-Villaroche (287°) et de Brétigny (295°) étaient, à 8° près, orientées de manière similaire (l'aéroport de Brétigny étant situé à l'Ouest-Sud-Ouest de Melun- Villaroche). 

C'est que le comportement de l'écoulement d'air à l'apex d'une aile est forcément compliqué par les vortex terminaux. 

Le problème rencontré devait être connexe des profiles laminaires de l'époque puisque les chasseurs à réaction US volaient presque constamment avec des réservoirs de bout d'ailes.

Sur le NC 1080, on avait commencé à essayer de les contenir en terminant chaque demi-aile par une cloison verticale, dès après le premier saut de puce. 

Après le premier vol réel, on préféra rajouter deux ailerons minuscules (0.45 cm de long chacun) aux spoilers, ce qui changea très heureusement la situation. 

{Pour mémoire, le bombardier léger NC 270 (éliminé - à 85 % de finition - par la décision Ramadier) avait une structure aérodynamique quasi-identique et très largement validée par la maquette volante pilotée NC 271-01 à l'échelle 0.4. 

Le fuselage de ces maquettes  rappelait aussi étonnement celui du NC 1080, en plus fin (car débarrassé du volumineux réacteur Nene à compresseur centrifuge), ce qui aurait permis de voir le potentiel de vitesse de ces cellules une fois monté un réacteur axial comme le futur ATAR 101 de la SNECMA.} 

Les Ailes du 13 Août 1949 démontrèrent, par deux photographies de qualité très moyenne, que le NC 1080 avait enfin repris ses vols. 

Cependant, après montage de modifications complémentaires, l'avion resta au sol jusque au mois de Novembre 1949. 

Du fait de la mise en pièce de la Société Nationale Aéronautique du Centre par Paul Ramadier (ministre de la Défense nationale dans le gouvernement Queuille #1), l'avion - récupéré par Nord Aviation - n'était plus assuré, donc on avait travaillé dessus au sol mais on n'avait pas (ou très peu) fait voler l'avion (Les Ailes du 26 / 11 / 1949) !


Fin Février 1950, des servo-commandes aidèrent à rendre les commandes de gauchissement bien plus légères, le pilotage de l'appareil se montrant alors facile et homogène. 

Les performances furent obérées par des entrées d'air mal dessinées car le piège à couche limite était mal dessiné et mal intégré au dessin du fuselage.

Le CEV en sortit le commentaire suivant : "Confronté en Avril 1950 à l'Arsenal VG 90 et au SNCAN N 2200  lors d'évaluation officielles limitées organisées à Brétigny, portant sur le domaine ouvert en Mach / vitesse et sur le comportement en configuration appontage, il [le NC 1080] se révéla relativement homogène lors de l'exploration effectuée lors des deux premiers vols CEV du 6 Avril.

Décollant à 180 km/h en 700 m, croisant à 620 km/h à 3 000 m, il atteignait 720 km/h au régime maximum et Mach 0.64 en piqué.

En dépit de quelques petits défauts (dissymétrie latérale en croisière, jeux de commandes) et après réduction d'efforts excessifs rencontrés en gauchissement, le jugement initial favorable restait à confirmer en configuration appontage.

Mais  l'appareil fut détruit le lendemain, percutant sur le dos lors d'un vol constructeur, à l'issue d'une perte de contrôle d'origine indéterminée. 


Ce que ce texte ne dit pas, c'est que c'est Sarrail, pilote du CEV qui avait eut l'idée d'amener Pierre Gallay, qui avait piloté le Nord 2200 la veille, à piloter aussi le NC 1080. 

La carrière du Nieuport NC 1080 se termina malheureusement en fin de journée, le Vendredi 7 Avril 1950, alors que Pierre Gallay le découvrait depuis à peine 15 minutes ! 

Sarrail lui avait fait réaliser un amphi carlingue intensif.

La sortie du parachute anti-vrille peu avant le crash suggéra que le pilote avait confondu la commande de sortie du train (placé à cet endroit sur le Nord 2200) avec le déclencheur de ce moyen de sauvetage en cas de vrille à plat.

J'ai lu, dans le Fanatique de l'Aviation, me semble-t-il, un article où deux anciens ingénieurs-généraux de l'armement regrettait que ce vol ait eu lieu un Vendredi soir, donc en un moment de fatigue intense. 

Tous deux exprimaient la profondeur de leurs regrets au sujet du pilote mais aussi de l'avion qui leur semblait particulièrement prometteur, le seul des trois à être adapté à se poser ou à décoller sur un porte-avions.

Léonard Rosenthal et al. (in Nieuport 1909-1950, Docavia # 38) rapporte que Jean Sarrail, qui pilotait le NC 1080 pour le CEV, exprimait que "le gauchissement, à 500 km/h, demandait une action anormalement importante, alors que la profondeur et la direction étaient homogènes

Les aérofreins étaient efficaces et l'appareil avait de bonnes qualités d'appontage. 

Dans l'ensemble, le NC 1080 se comportait "comme un Spitfire" (léger) comparé au VG 90 et au N 2200 qui auraient été plus proches du P 47 (plus lourd)."


Les Ailes du 22 Avril suivant écrivaient que la commission d'enquête semblait n'avoir découvert aucune rupture structurale et avoir constaté que le réacteur fonctionnait encore au moment du crash.

Dans toutes les publications, la vitesse de pointe est donnée pour 977 km/h, la vitesse ascensionnelle initiale est donnée soit pour 28 m/s soit pour 25 m/s.

La montée à 9 000 m prenait 12' 12". Le plafond pratique était de 12 700 m.

L'autonomie était de 1 500 km à 12 000 m d'altitude.




L'Arsenal VG 90 avait été conçu par l'ingénieur Galtier (père du VG 33 de Juin 1940). Sa forme rappelait beaucoup celle du VG 70 en bois.

Le revêtement des ailes était en bois, ce qui peut étonner, vu les vitesses envisagées (proches de Mach 0.8 au niveau de la mer, ce qui entraînait nécessairement un échauffement des parois qui pouvait dégrader les colles employées).

Long de 13.44 m, cet avion avait une masse de 5 100 kg à vide et de 8 100 kg au décollage. 

La voilure avait une envergure de 12.60 m et une surface de 30.70 m².

La charge alaire valait donc 263 kg/m².




                       Arsenal VG 90  - On remarque des problèmes bien gênants pour tout avion embarqué :
  •  La très faible garde au sol imposée par le train court qui induisait une collision de l'arrière fuselage avec le sol au décollage.                      
  • L'assiette très cabrée qui réduisait la visibilité vers l'avant lors des appontages.    
  • Les prises d'air, situées en aval de l'emplanture de l'aile, auraient gagné à être significativement avancées.

Les performances attendues étaient élevées avec 915 km/h au niveau de la mer et 940 km/h à 6 000 m. 

On réalisa 855 km/h au niveau du sol.

La vitesse ascensionnelle, prévue pour 22 m/s, se trouva réduite à 15 m/s.

Le CEV (voir référence plus haut) regretta :
"Ce chasseur présentait quelques erreurs de conceptions importantes, notamment une mauvaise visibilité vers l'avant , qui limitait les possibilités d'approche dans l'axe et un atterrisseur court dont la géométrie ne permettait pas d'envisager un appontage sans impacter avec l'arrière du fuselage... 

En vol, les premières évaluations  révélèrent des caractéristiques assez convenables dans le domaine de vitesse étudiées (entre 200 et 720 km/h - Mach 0.59), avec une certaine hétérogénéité des commandes, le gauchissement durcissant fortement à vitesse élevée."


Malheureusement, le 25 Mai 1950, le VG 90 fut détruit en vol à basse altitude, causant la mort de son pilote Pierre Decroo. 

D'après Jean Cuny, (in Les avions de combat Français 1944-1960 #I - Chasse-AssautDocavia # 28), cet accident fut causé par la rupture d'une pièce métallique qui avait pour fonction, en vol, de maintenir fermé le train d'atterrissage. Le train s'abaissa intempestivement et ceci provoqua la chute de l'avion qui, à ce moment, volait à basse altitude.

Un second exemplaire était en construction. 
Rapidement modifié, en particulier en montant des ailes entièrement métalliques, il prit la suite des essais en Juin 1951.

Il  atteignit rapidement plus de 900 km/h en palier, dépassant largement les vitesses obtenues par le chasseur SO 6020 de l'Armée de l'Air. 

Cependant, les performances restaient trop faibles pour une seule raison : Le mauvais dessin des entrées d'air, bien qu'elles aient été considérablement mieux pensées que celles du SO 6020.

J'ai l'impression que les entrées d'air du VG 90 auraient gagné à être déplacées bien plus en amont de l'emplanture des ailes.

Les ennuis de mise au point du SO 6020, étaient liés d'abord à des prises d'air de réacteur particulièrement mal dessinées.

On peut aussi évoquer les multiples exigences de l'Etat-Major (qui voulait, simultanément, 4 canons de 30 mm - soit, hors munitions, 350 kg de canons - 4 mitrailleuses de 12.7 - environ 120 kg de mitrailleuses - et l'emport de 2600 litres de fuel).

Les meilleures performances du VG 90 entraînèrent l'Armée de l'Air à s'intéresser à lui.    

Le 21 Février 1952, le VG 90-02 s'écrasa au sol, apparemment à cause d'un flutter d'empennage, et emmenant dans la mort son pilote Claude Dellys : On avait oublié d'équilibrer statiquement les ailerons !




Le Nord 2200, dessiné par l'ingénieur Buret, fut commandé, en tant que prototype, le 27 Décembre 1946.

C'était un avion à ailes basses et à entrée d'air type Pitot, ce qui était, à cet instant où tout le monde avait peu de connaissances sur les interactions entre couche limite et entrées d'air, le moyen le plus sûr d'alimenter correctement un réacteur.

Cet avion, long de 13.50 m et avait une masse de 5 280 kg à vide et de 8 350 kg au décollage. 

Son envergure était de 12 m et sa surface alaire était de 31.60 m², démontrant une charge alaire de 264 kg/m².

La vitesse de pointe, atteinte assez vite, était de 815 km/h mais la vitesse ascensionnelle atteignait tout juste 15 m/s. 

La carrière de l'avion fut freinée par un incendie qui exigea une longue reconstruction.

Une dérive très agrandie fut montée pour améliorer la stabilité.

Lorsqu'un moteur Rolls-Royce Tay de 2850 kg de poussée fut monté, à la fin 1952, la vitesse de pointe dépassa un peu les 900 km/h (Green & Swanborough donnent 936 km/h à 5 000 m et une vitesse ascensionnelle initiale de 23 m/s).

Le plafond pratique était de l'ordre de 12 000 m.




Nord 2200


Le CEV (voir références plus haut) reconnaissait : 
"Le rendement de manche était excellent (très supérieur à celui de VG 90) et tirait le meilleur parti de la poussée du réacteur

Mais il était impossible d'aller au delà dans l'exploration des vitesses élevées en raison de l'inefficacité totale des aérofreins d'intrados dont l'ouverture ne provoquait aucune décélération, alors que le couple piqueur des spoiler d'extrados faisait croître la vitesse en compensant l'effet de leur freinage : L'appareil devait être considéré comme n'ayant pas d'aérofreins.

Ses qualités de vol, particulièrement examinées dans la configuration appontage, étaient caractérisées par une stabilité statique marquée, avec des pentes d'efforts à la profondeur qui permettaient de stabiliser aisément la vitesse indiquée recommandée de 190 km/h.

Mais il était transversalement instable et les oscillations en roulis le rendaient désagréable à piloter dans les turbulences.

Par contre, au delà de 350 km/h, les efforts à la profondeur ne permettaient plus de d'obtenir une mise en virage avec un facteur de charge supérieur à 1.2 g sans recours au compensateur, par ailleurs très efficace (la commande du plan fixe était aussi très efficace, mais sa commande trop brutale interdisait son emploi à grande vitesse)

Le gauchissement était efficace, avec des efforts supportables, mais avec une zone d'inefficacité autour du neutre.

La direction était totalement inefficace, avec des efforts très importants, et les virages s'effectuaient sans l'utiliser, grâce au lacet direct des ailerons.

En configuration et au poids d'appontage, après un battement d'ailerons et un buffeting précurseur vers 170 km/h, il décrochait vers 155 km/h par une abattée à droite, la reprise de contrôle s'effectuant après une perte d'altitude de 400 m.

Ces décrochages se produisaient à 165 km/h en configuration décollage et 190 km/h en lisse.
Dans l'ensemble, aucun défaut rédhibitoire dépourvu de solution corrective en cours de mise au point n'avait été constaté sur l'appareil."


L'ensemble de ces commentaires sont assez étonnants parce que le Nord 2200 a "vécu" au CEV de 1950 à 1954. 

Soit ils correspondent à la première période d'essais (jusqu'à l'incendie), soit ils englobent la totalité de la "vie" de l'appareil.

L'incendie du 24 Juin 1950, dû à l'oubli de refermer le réservoir de carburant (?!), l'avait fortement endommagé, la reconstruction de ce chasseur avait duré exactement 11 mois. 

Pourtant le nombre de points de détails encore à régler laisse rêveur.

L'avion s'était, en plus, beaucoup alourdi et sa vitesse de pointe fut mesurée à 815 km/h.



Le couperet Ramadier


Au milieu de l'année 1949 (Les Ailes du 09 Juillet 1949), le ministre de la Défense Nationale, Paul Ramadier, décida de dissoudre la société Aérocentre,  

En gros, en s'appuyant lourdement sur l'accident fatal du transporteur lourd NC 211 Cormoran-01, il accusa les ingénieurs de cette société de ne pas savoir fabriquer des avions capables de voler

Cela n'avait strictement aucun sens.

Je reviendrais sur cette question dans un autre article.

En réalité, cette société nationale, ayant servi aux exigences multiples découlant de la Libération, présentait de ce fait un bilan financier largement déficitaire. 

Cette décision eut de lourde conséquence sur notre meilleur prototype embarqué.


Un peu de recul 

Les trois prototypes Français que je viens de décrire ont subi un sort peu enviable, leur élimination se produisant étonnamment en quelques semaines. 

On pourrait s'amuser à imaginer de folles hypothèses conspirationnistes, surtout en constatant la concentration de ces accident sur une période de 2 mois.

Mais, à regarder ce qui s'est passé dans les pays qui tenaient la corde de la technologie aérienne de cette époque, ces accidents avaient de bonnes chances de provenir de la conjonction de plusieurs facteurs qui concernèrent :
  • Le manque de pratique rigoureuse au niveau de la construction des cellules, puisque, pendant les 4 années d'occupation, ouvriers et techniciens travaillaient le plus lentement possible, voire sabotaient leur travail, puisqu'il était destiné aux Allemands. 
  • Il aurait fallu réintroduire les meilleures pratiques calmement. Mais, la dictature syndicale CGT de l'immédiat après-guerre avait conduit à se servir des entreprises nationalisées pour les transformer en réservoirs de chômeurs pour fabriquer des tracteurs ou des trolleybus, qui, bien sûr, ne se vendaient pas ! 
  • Ces ouvriers, très peu motivés, multipliaient leurs absences, travaillaient mal et entraînaient des pertes financières abyssales pour leur entreprise (notamment Aérocentre).
  • On avait voulu sortir très vite des avions exigés omnipotents en emportant un énorme armement et des quantités considérables de carburant. De ce fait, ils étaient en général incapables de tenir les performances promises (échecs du VB 10 et du SO 6020 Espadon).
  • La découverte des effets de la compression subsonique et des énormes contraintes qu'elle faisait subir aux structures fut brutale. Ces deux facteurs suffisent à expliquer les accidents des VG 90.
  • La faible compréhension de l'importance de l'ergonomie à l'intérieur des postes de pilotage des nouveaux avions semble suffire à expliquer l'accident du NC 1080.
  • J'ajouterais quelque chose qui me paraît fondamental : On a commandé, comme en 1935, tout à tout le monde. 
    • Ainsi, Aérocentre, l'Arsenal de Villacoublay et la SCAN étaient en compétition pour les chasseurs embarqués,
    • Dans le même temps, Aérocentre avec son NC 270 et la SNCASO avec son SO 4000 étaient en compétition pour les bombardiers. 
    • Ceci est d'autant plus navrant que Aérocentre avait fait voler le bombardier embarqué NC 1070, qui déçut soit-disant les décideurs qui préférèrent acheter des Douglas A 26 Invader qui n'étaient absolument pas plus rapides et certainement ni embarquables, ni manœuvrants.


Pourtant, si on compare ces trois chasseurs embarqués Français aux avions contemporains de l'aéronavale Britannique ou US, il me semble qu'ils démontraient de véritables capacités.

Chacun avait son type personnel de train tricycle et aucun n'a posé aucun problème. 

Chacun disposaient d'une voilure efficiente.

Les performances étaient plutôt honorables eu égard au vrai souci qui demeurait entre les entrées d'air et la couche limite. 

Là, notre retard important aurait dû imposer, pour commencer, des entrées d'air Pitot, quitte à les modifier ultérieurement (ce que Dassault a su faire en passant, par étapes successives, de l'Ouragan à l’Étendard IV, dont le successeur direct volait encore il n'y a pas si longtemps).

Par contre, le jour où il aurait été possible de remplacer le volumineux RR Nene par un ATAR 101, beaucoup moins ventru et aussi puissant, nos trois chasseurs auraient réalisé un bond non négligeable en vitesse.

Nos décideurs ont renvoyé dans les limbes le chasseur NC 1080, le plus intéressant des trois, qui aurait pu soutenir sérieusement nos troupes dans la période des guerres de décolonisation.

Ils ont préféré acheter des DH Vampire (déjà achetés pour l'Armée de l'Air), sous leur forme plus récente du Sea Venom (qui deviendra pour nous l'Aquilon) que nous avons gardé jusqu'en 1961...

Notre Marine resta une force d'appoint secondaire à cause de cela. 

Il fallut attendre 1962 (mise en service de l'Étendard IV M) pour qu'elle accède enfin à un statut plus autonome par rapport à nos alliés.