vendredi 11 juillet 2014

La Fleet Air Arm (Aéronavale) Britannique, vraiment de retour ? (révisé 15 / 09 / 2022)




Le 4 Juillet, date très symbolique pour tout Anglophone


La reine Elisabeth II a baptisé 4 Juillet 2014 le nouveau plus gros navire de la Royal Navy, le porte-avion HMS Queen Elisabeth (à voir sur le site Mer et Marine).    

Ce navire, comme son frère qui suivra bientôt le même chemin, est un navire imposant (280 m de long, 70 m de large et 65 000 tonnes).

Le terme fleuron lui est souvent associé.

Certes, c'est un navire puissant. 

Mais il ne soulève en aucune manière l'admiration, en tout cas pas la mienne.


Il a été baptisé juste le jour de l'Independence Day, ce fameux jour où les USA, fortement aidés par la France, ont proclamé leur indépendance... contre la Grande Bretagne !


Or, le cœur militaire de ce navire, justement, est issu de choix purement US (je veux dire : décidé par le Congrès Américain).

Les avions qui se poseront sur son pont seront Américains de même que les canons qui tenteront de le défendre des agressions à courte distance.


Hors de prix

Le porte-avion Britannique dispose d'une DCA limitée à des canons Phalanx CWIS à courte portée - apparemment inférieure à 6000 m - en plus, bien évidemment, d'un ensemble d'hélicoptères et d'avions.

Les 40 aéronefs embarqués seront soit des hélicoptères, soit une grosse douzaine de Lockheed-Martin F 35 B (celui de l'US Marine Corps).

Oui, vous savez, ces fameux JSF dont le constructeur fait toujours une publicité éhontée mais qui n'a, pour l'instant, rien démontré opérationnelle
ment, presque 15 années après le premier vol du prototype (voir cet article).
En plus, ces appareils ont été interdits de vol fin Juin 2014 pour cause d'incendie moteur en plein vol (toujours mal expliqué près de 100 jours plus tard) !

Cette interdiction de vol fut assortie d'une interdiction de taxiing sur les pistes d'aérodrome, ce qui est une première à ma connaissance et l'indice d'une inquiétude réelle du motoriste, comme le fut aussi l'envoi d'une maquette grandeur nature du JSF... (voir cet article d'Aviation Week sur le sujet, ainsi que les commentaires qui y sont attachés).


Or, les F 35, de quelque version qu'il s'agisse, ne sont absolument pas capables de conquérir la suprématie aérienne sur qui que ce soit car ils ne possèdent aucune des qualités nécessaires pour y parvenir.

Pire encore, les lois de Lanchester, qui prédisent que le succès au combat va plus facilement vers les armées les plus nombreuses, montrent qu'avec 14 avions, les Britanniques ne risquent pas de dissuader grand monde.


En conséquence, le nouveau porte-avions Britannique est une sorte de gros Mistral, mais absolument pas un instrument susceptible d'emporter une décision face à un adversaire de haut niveau.


Toute comparaison avec le PA Charles de Gaulle - capable, lui, d'imposer sa présence à distance - est donc impossible.

Le groupe aérien n'est pas plus abondant que celui du porte-avions Français, et il ne dispose même pas d'un Hawkeye pour visualiser l'environnement aérien lointain ou volant à basse altitude (pas de catapulte ni de piste oblique). On dit que le F 35 a des capacités similaires, c'est possibles mais pas démontré.

Donc, nous nous trouvons face à une puissante plateforme anti-sous-marine, un navire apte à envoyer des avions de bombardement à quelques centaines des kilomètres de lui.

Ce n'est pas un navire capable de lutter contre une puissance majeure, même si je suis sûr que les marins Britanniques, grâce à leur considérable expérience, multiplieront les astuces pour en faire un engin efficace.


Un tel engin pouvait impressionner encore dans les années 80, à la fin des guerres coloniales (Malouines).

Mais, en réalité, les Britanniques viennent d'acquérir un double Mistral pour le prix de 6 ou 7. Voilà donc une dépense qui n'est pas rentable


La Fleet Air Arm en  reste donc à son statut actuel de force d'appoint pour les USA, ce qui a commencé lorsque le Royaume Uni a abandonné l'avion TSR 2, vecteur de la RAF et non de la Royal Navy, pour sa force de dissuasion. 

Oui, Monsieur Morin, abandonner la dissuasion nucléaire indépendante est un tout.

Maintenant, au moment où Bercy continue de désarmer méthodiquement la France, on constate que le démantèlement des puissances militaires en Europe est bien avancé ! 

Nos gouvernants, nos politiciens et nos syndicalistes n'ont aucune conscience de l'importance de notre Souveraineté Nationale.



Coup de projecteur du 1er Juillet 2020 : En ce jour précis, le monde ne va pas mieux qu'en 2014, même si, en Europe le coronavirus baptisé Covid 19 commence à calmer ses ardeurs. Les USA viennent de perdre 130 000 morts de son fait (mais il a été aidé). 
Je fait juste remarquer que ce nombre serait digne d'une grande bataille de la Guerre de 1914-1918

Il y a 4 jours, le NAO, sorte de Cours des Comptes Britannique, s'inquiétait de l'avancement de ce navire vers son rôle opérationnel. 

Pour que ce soit possible, il faudrait qu'il dispose d'aéronefs (F 35B, ex-JSF), qu'il puisse aussi détecter les menaces lointaines sur Air, sur Mer et sur Terre. 





F 35 B décollant du HMS Queen Elisabeth - Le navire n'est, apparemment, pas vraiment chargé et la proximité du tremplin tend à faire croire que l'avion monte mal.


Il semblerait que ce porte-avions :
  • ne dispose que de 14 avions, moins de la moitié de ce qu'emmène le CDG, 
  • nos Rafale Marine sont beaucoup plus armés que les F 35, 
  •  n'ait pas encore de radar aérien opérationnel (programme trop ambitieux ?) 
  • ne soit pas encore bien équipé contre les sous-marins.,

Le missile de croisière AGM 158 C (de Lockheed-Martin), qu'il peut déployer, démontre une forte parenté d'aspect  avec les missile Apache (MATRA/MBB) et à son dérivé, le SCALP - EG.

Les portées sont de l'ordre de 1 000 km, mais la charge transportée reste de l'ordre de la demi tonne. Si elle n'est pas nucléaire, elle a peu de chance d'impressionner qui que ce soit.

Tout cela ne donne pas l'impression de puissance que dégageait la RN à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale.










lundi 7 juillet 2014

La violente histoire de la Pologne explique le drame de 1939... mais, aussi, l'actualité Ukrainienne de 2014 ! (Révisé le 20 / 05 / 2023 ***)






La Pologne est un pays extrêmement attachant et qui a beaucoup apporté au monde. 

Elle servit, bien involontairement, de première victime à la puissante Wehrmacht de Hitler pour déclencher SA guerre.

De cette manière, les soldats Allemands, en se confrontant d'emblée à des fantassins très entraînés et d'un courage légendaire, apprirent en trois semaines que les options choisies par leurs chefs étaient terriblement efficaces.


Ils avaient désormais acquis une grande confiance en eux-mêmes comme dans les trois forces qui les soutenaient de manière parfaitement efficace : Les chars de Guderian, les avions de Kesselring et les navires de Raeder et de Doenitz.


Le choix d'Hitler d'attaquer ce pays démontrait aussi la qualité de son service de renseignement qui avait su déceler les nombreuses faiblesses des choix militaires Polonais.

Il confirmait enfin l'efficacité démobilisatrice de ses paroles mielleuses face au particulièrement médiocre premier ministre Britannique Neville Chamberlain à Bad Godesberg puis à Münich en Septembre 1938. 

En agitant le spectre de la guerre en Europe, Hitler avait mis hors jeu la France et la Grande Bretagne tout en désarmant définitivement la Tchécoslovaquie, leur plus solide allié.

En effet, la puissance militaire Tchécoslovaque eut été bien plus dangereuse pour la Wehrmacht que celle de la Pologne, avec une aviation de chasse trois fois plus nombreuse et considérablement mieux équipée, une puissante artillerie antichars, d'excellents chars de combats, mortels à 600 m pour les Panzer I et II, alors très largement majoritaires, encore très dangereux pour les excellents Panzer III Allemands qui ne commencèrent à être produits qu'à partir de 1939, après l'annexion de la "Bohème-Moravie" (=  Tchéquie) par le IIIème Reich.


Avant de souligner les impasses désastreuses des décideurs Polonais, dont la première - politique, à cause du ministre des Affaires Etrangères Beck - fut d'abandonner la Tchécoslovaquie à Hitler et dont les autres furent techniques, je vous invite à visiter l'évolution géographique de la Pologne en remontant 4 siècles plus tôt.


Petit rappel d'un lointain passé 

La carte de 1634 (en France, 6 années après sa prise de La Rochelle, Louis XIII régnait avec l'aide efficace du cardinal de Richelieu) que je propose à votre observation attentive a été publiée dans un dictionnaire encyclopédique Français publié vers 1900, période à laquelle la Pologne n'existait plus.
 
Elle avait perdu son indépendance. 

Divisée en provinces réparties entre ses ennemis, il était bien difficile de lui tracer des frontières. 
Alors, par cette carte, l'auteur de l'article avait probablement voulu montrer ce qu'avait été, jadis, le "Grand Royaume de Pologne", ou, plus exactement, le Royaume des deux Nations. 

On y voit que la seule frontière facilement défendable de ce royaume était la crête Carpatique au Sud-Ouest, face à la Hongrie.

Les autres frontières étaient des plaines rarement bordées de lignes d'eau, sauf dans la partie Sud de l'actuel Ukraine.

Cette Pologne, associée au Duché de Lituanie, avait combattu en permanence et de tous côtés, s'étalant surtout au Sud et à l'Est, au détriment de la Russie (détruisant la Russie - ou ''Rous'' - de Kiev). 

L'impérative nécessité 
de combattre en permanence avait fini par forger de très fortes vertus militaires au sein des populations de ce royaume, les plus belliqueuses qui soient.
La pratique politique y était d'apparence relativement démocratique (uniquement en apparence). 

Mais la notion d'intérêt national touchait vraiment très peu les hobereaux aux ego surdimensionnés (comportement qui n'est propre ni à la Pologne ni au passé).




Collection  personnelle de l'auteur. Carte de la Pologne en 1634 ! La Russie y est baptisée Tzarat de Moscovie



Les appétits de l'Empire Ottoman, de l'Empire Austro-Hongrois (que la Pologne avait pourtant largement contribué à sauver des Turcs peu avant), de l'Empire Russe et même du Royaume de Suède, avaient largement profité des divisions suicidaires créés par les clans internes au système étatique Polonais, avec l'aide évidente de subsides venus des différents voisins. 

Ainsi, les cosaques Ukrainiens s'étaient alliés aux Russes, ce qui eut (et a
, encore aujourd'hui), des répercussions considérables (les cosaques du Don se russifièrent complètement, tandis que les cosaques Zaporogues choisirent, pour la plupart, une direction exactement opposée...).

En 1795, la Pologne avait donc disparu des cartes de Géographie, malgré de nombreux soulèvements, tous réprimés dans le sang.





Au XIXème siècle, la Pologne n'était plus qu'une province de la Russie (ou de la Prusse, voir sur ce site Larousse : Allemagne, Histoire, chap. 5)


En 1916, un simulacre d'octroi d'indépendance Polonaise fut imaginé par les Empires Centraux (Allemagne de Guillaume II et Autriche Hongrie de François-Joseph). 

Ce n'était qu'une duperie destinée à transformer les soldats Polonais en chair à canon anti-Russe pour pouvoir masser plus de troupes Allemandes sur le front Français. Cette manœuvre minable échoua, heureusement.

La Pologne, dont Pilsudski avait proclamé l'indépendance le 11 Novembre 1918, fut finalement et heureusement ressuscitée par le traité de Versailles en 1919. 


Hélas,
 en réalité, le président Américain Woodrow Wilson ne s'occupait ni des nations ni des peuples. 
Il écoutait uniquement les groupes nationalistes, avec l'idée majeure de faire de leurs pays d'éternels clients des USA (pratique dangereuse s'il en est).

A l'imitation du chancelier Prussien Bismarck, il prétendait que les nationalités devaient reposer seulement sur la nature de la langue parlée (ce qui - en bonne logique - aurait dû faire des USA juste un morceau de l'Angleterre !). 

L'application irréfléchie de cette théorie linguistique fut, en fait, très défavorable à la Pologne. 

L'enclavement de la Prusse Orientale et le refus de reconnaître Dantzig comme ville Polonaise ouvrait la porte aux contestations incessantes de tout maître d'une Allemagne expansionniste.

Il est probable que quelques "brillants esprits" aient imaginé que l'intrication de territoires Allemands et Polonais pouvait servir à corseter l'URSS et à limiter la mainmise communiste sur l'Europe. 

Ce calcul fut catastrophique.

L'allumette destinée à déclencher la Seconde Guerre Mondiale était en fait mise en place par un homme qui voulait apparemment la Paix.


Pourtant, la première agression que la Pologne dut subir vint de l'URSS de 1920 qui voulait en faire un état bolchevique.

Les Polonais, dont l'Eglise Catholique avait permis de maintenir la cohésion nationale, ne partageaient vraiment aucune des idées de Lénine. 

Ils n'entendaient surtout pas devenir une province marxiste et athée de l'URSS :  Ils voulaient simplement retrouver leur souveraineté perdue au 18ème siècle. 

Il est facile de les comprendre.

Ils résistèrent donc brillamment, 
avec le soutien des Alliés victorieux de l'Allemagne (en particulier de la France), aux troupes du Général Mikhaïl Toukhatchevski, de Leon Trotski et de Joseph Staline. 

Ce fut à ce moment là que le Maréchal Pilsudski, victorieux des Bolcheviques, devint dictateur et donc le maître de la Pologne, jusqu'à sa mort en 1935.




La Pologne du traité de Versailles (Wikipedia)


Pendant tout son règne, Pilsudski tenta à la fois de réunir les pays Baltes, la Pologne et la Biélorussie dans un ensemble stable apte à résister à l'URSS comme à l'Allemagne. 

Au moyen de ce qu'il appela sa politique prométhéenne (du titan Prométhée, héros de la mythologie Grecque, qui donna le feu aux humains), il finança largement les divers mouvements indépendantistes (en particulier Ukrainiens, déjà...).

L'histoire a montré, ensuite, qu'il n'avait pas pris en compte les divisions internes de son pays.

Malheureusement pour son pays, il avait fait sanctuariser l'infanterie et la cavalerie parce qu'elles lui avaient permis de l'emporter en 1920.

Comme en France, elles drainaient beaucoup trop d'argent au détriment des armes modernes qu'étaient clairement les blindés et l'Aviation, et même l'Artillerie, l'Aviation étant elle cantonnée au taux ridiculement faible de 2% du budget militaire !

La Pologne du traité de Versailles, hélas, disparut de nouveau sous les coups associés de Hitler et de Staline en 1939.

Parmi les membres de l'élite Polonaise qui étaient restés dans leur pays, 25 000 furent assassinés, notamment à Katyn, par le NKVD de Beria, sur ordre de Staline.

La Pologne, telle que nous la connaissons, fut redessinée en 1945 par Staline à Yalta avec la bénédiction absolue de Roosevelt

Cela s'accompagna de transfert de populations pour éviter tout irrédentisme (du genre de celui des Sudètes de Tchécoslovaquie pour se rattacher à l'Allemagne en 1938). 

Si cette solution était brutale, elle avait cependant l'immense mérite de régler les éventuels mécanismes qui pourrissaient la vie des pays Balkaniques lorsque les différentes communautés refusaient totalement de vivre ensemble.



La Pologne de 1945, est la partie blanche augmentée des parties roses mais diminuée de la partie grise (Wikipedia)



Les Polonais y ont vu, à tort, l'intervention de la Russie, oubliant que le Géorgien Josef Dougachvilli (dit Staline) n'avait aucune considération ni pour la Russie ni pour son peuple (qu'il avait considérablement massacré), pas plus que pour aucun autre peuple au monde. 

Seul son propre pouvoir l'intéressait.


Les moyens de l'aviation Polonaise en 1939


La chasse


Avant le XX ème siècle, l'arme la plus rapide était la cavalerie et les Polonais avaient 
d'excellents cavaliers que Russes et Allemands avaient appris à respecter. 

La 1ère Guerre Mondiale s'était terminée, je le rappelle à tout hasard, sur le triomphe des chars et des avions.

Étonnamment, la vaste Pologne s'était peu intéressée aux chars et aux avions. 

Pour autant, elle ne manquait pas d'excellents pilotes, ce qui aurait pu lui permettre une rapide montée en puissance.


En 1934, elle disposait d'un bon chasseur pour l'époque, le PZL 11, peu puissant, mais léger, doté de très bonnes capacités manœuvrières et d'une bonne vitesse de montée.

L'avion était long de 7.55 m et sa voilure de 11 m d'envergure avait une surface de 17.9 m².

La masse de ce chasseur était de 1 150 kg à vide et 1 630 kg au décollage, lui conférant une charge alaire de 91 kg/m².

Sa construction intégralement métallique lui conférait un état de surface bien supérieur à celui des productions contemporaines.

Il atteignait, au moment de sa livraison, 370 km/h en altitude tout en gardant une vitesse minimale de 110 km/h, excellente vu l'absence de volets (le Dewoitine 500, contemporain, décrochait à 125 km/h). 





Le rayon d'action était de 700 km.

Toutefois, même si sa vitesse de montée à 5 000 m en 6 minutes était très bonne, les 7 000 m étaient atteints en 13', ce qui n'était plus du tout du même niveau (le Bf 109 E, dans le même temps, était presque 1 000 m plus haut - Les Polonais ne pouvaient tout de même pas se réjouir de ce que le Morane 406 perdait 5 minutes sur le PZL 11 dans cette montée !!!). 

Le plafond pratique ne dépassait pas 8 000 m, ce qui était très insuffisant, et donc pain béni pour les avions de reconnaissance Allemands et Russes qui passaient facilement au-dessus.

De plus, son armement était limité à 2 mitrailleuses de 7.92 mm (le Dewoitine 500, contemporain, en portait le double). 
Ces armes légères étaient en outre, semble-t-il, sujettes à des enrayages fréquents.

Un doublement de cet armement fut réalisé tardivement sur le tiers des avions existants avec des mitrailleuses plus fiables.


En 1939, la Pologne possédait encore 110 exemplaires du modèle C (que je viens de décrire), 20 exemplaires du modèle A, plus ancien 
(et encore plus lent de 40 km/h lors de la livraison) et une trentaine d'avions en réparation.

A cela, se rajoutaient 30 PZL 7 très usés qui ne devaient même pas atteindre les 300 km/h.

Dans le meilleur des cas, l'aviation Polonaise disposait donc en tout de 190 avions de chasse dont un tiers n'avait aucune chance d'effectuer quelque couverture aérienne que ce soit.

Pourtant, dès 1936, les avionneurs Polonais avaient compris que leurs chasseurs étaient complètement archaïques et tentèrent d'en fabriquer de plus modernes. 

Le projet choisi tarda à se concrétiser parce que la technologie des ailes basses sans mâture ni hauban (dits cantilever) (comme celle des trains escamotables) n'avait pas été comprise.

Le gouvernement tenta alors une remotorisation du PZL 11 C en PZL 11 G qui pouvait passer les 390 km/h, ce qui ne changeait malheureusement pas les données tactiques : Il manquait toujours 160 km/h à ce chasseur ! 

En plus, cette décision fut bien trop tardive pour être réalisée : Un seul exemplaire semble avoir été employé opérationnellement !

Cette décision était, par elle-même, stupéfiante, car la Pologne avait, dans le même temps, construit et vendu pour l'exportation de nombreux exemplaires d'un dérivé bien plus performant du même avion, le PZL 24.

Cet appareil reçut, successivement, 3 versions du moteur Gnome et Rhône K 14. 






La vitesse de pointe de ce chasseur atteignait 430 km/h avec le moteur le plus puissant.
Son plafond dépassait 10 000 m.

Pour je ne sais quelle obscure raison, sans aucun doute restée secrète, cet avion ne fut pas commandé en grande série par les Polonais (même si l'Histoire de l'Aviation publiée par René Chambe en 1960 contenait une superbe aquarelle de Paul Lengellée montrant un PZL 24 en plein combat en 1939 !).

Pourtant, ce chasseur eut été capable de modifier très sérieusement la balance des forces aériennes en faveur de son pays d'origine dès le 1er Septembre 1939. 

Plus rapide de 50 km/h et meilleur grimpeur que son aîné, il pouvait courser tous les bombardiers Allemands (ou Soviétiques) et offrait une toute autre capacité défensive face aux Messerschmitt Bf 109.

En effet, les Bf 109 des séries C et D, antérieures à la série E, en nombre encore important en Septembre 1939, n'avaient qu'un faible avantage de vitesse horizontale sur lui et montaient à la fois moins vite et moins haut.


Lorsque les Polonais comprirent en 1936 (avec 2 ans de retard) que le temps des ailes hautes haubanées et des trains fixes étaient révolus, le constructeur PZL décida de changer son fusil d'épaule de manière radicale et commença à élaborer un nouvel avion, le PZL 50. 




PZL 50 - Version I : Un poussah ! 



Cet avion montrait clairement l'influence du P 35 Américain (lointain ancêtre du P 47 Thunderbolt), qui, malheureusement, était loin d'être un succès. 

Ce PZL 50 vola effectivement en 1938 mais ne réussit pas à dépasser 440 km/h. 

L'engin n'était pas très manœuvrant aux dires de ses pilotes d'essai. 
Peut-être était-il seulement inhabituellement lourd aux commandes ? Sa masse de 50 % plus lourde que celle des chasseurs qu'il était censé remplacer pourrait en être l'explication.

De plus, il grimpait très lentement (plus lentement encore que le Morane 406, un exploit négatif !) et ne dépassait même pas un plafond pratique de 7 000 m.

Il suffit de regarder la photo ci-dessus pour comprendre que les fées de l'aérodynamisme avaient refusé visiter son berceau (et on les comprend) !

Le dessin du fuselage fut entièrement repris pour aboutir à quelque chose de proche du Bloch 151. 

Mais ce fut trop tard : La guerre venait de commencer. 




L'initiative Roumaine : Comment résoudre élégamment un problème en partant exactement du même point !  


La Roumanie avait acheté des PZL 11 à la Pologne puis avait aussi acheté la licence de fabrication de son successeur PZL 24. 

Les Roumains avaient bien analysé l'évolution technique des chasseurs dans le monde. 

Ils avaient donc décidé de construire un dérivé du PZL 24 comprenant des ailes basses, des volets de courbure et un train rétractable et ils le baptisèrent IAR 80. 

Le fuselage, depuis le poste de pilotage jusqu'à l'extrémité arrière, était quasi-identique à celui de son ancêtre Polonais. 

Le moteur avait été avancé par rapport à la voilure et un réservoir de plus grande taille avait été monté.

Le capot moteur, considérablement mieux profilé, cachait le même moteur que le PZL 24, un Gnome et Rhône de 930 Cv produit sous licence en Pologne.

L'habitacle, bien dessiné, avait des point communs avec celui du Spitfire, et comme lui, il n'assurait pas une vision à 360°.




IAR 80  -  On a du mal à imaginer que ce chasseur très fin était un dérivé direct du PZL 24



Le prototype en vola en Avril 1939, atteignit une vitesse de 510 km, monta à 5 000 m en 6 minutes et démontra un plafond de plus de 10 000 m. 

C'étaient d'excellentes performances.

Facile à piloter, l'IAR 80 était aussi très maniable. 
Il fut commandé en série.

Si Roumains et Polonais avaient unis leurs efforts, cet avion serait sorti plus tôt et aurait apporté à l'aviation Polonaise une capacité de nuisance considérablement supérieure contre les Allemands. 



Le bombardement


Les bombardiers Polonais étaient, eux aussi, peu nombreux.


Le plus abondant (si l'on peut dire !) était le PZL 23 Karas, monomoteur triplace employé autant pour le bombardement que pour la reconnaissance.


La conception paraissait "moderne" pour l'époque, mais le gros train fixe, la gondole inférieure taillée à coups de serpe et l'ouverture gigantesque destinée au mitrailleur lui mangeait certainement une bonne quantité de vitesse tout en induisant de sérieux problèmes de pilotage. 




PZL 23 Karas


Le moteur Bristol développait 700 Cv.

La vitesse de pointe atteignait 320 km/h à 3 650 m d'altitude et l'autonomie dépassait 1 200 km.

Cet avion montait à 2 000 m en 5 minutes et à 4 000 m en 15 minutes.

L'avion, peu maniable, avait des caractéristiques de vol dangereuses à grande vitesse. 

Il fut dit que la vitesse de pointe de 320 km/h était, en fait, la limite à ne dépasser sous aucun prétexte (VNO).

{ Les Ailes du 31 Décembre 1936 lui attribuaient, à la masse de 2780 kg - donc pour une reconnaissance - des vitesses maximales de : 
  • 280 km/h au sol.
  • 343 km/h à 4 000 m.
La charge alaire était alors de 102 kg/m² et passait à 128 kg/m² en mission de bombardement.

L'autonomie était de 1 500 km.

La montée à 4 000 m prenait 14 minutes.

Le plafond était de 8 000 m. }


Un bon point, cependant : La charge de bombe atteignait 700 kg
, soit 250 kg de plus que ce qu’emportait le Fairey Battle Britannique !

Sur les 210 exemplaires construits, 120 restaient opérationnels en unité au 1er Septembre 1939.
On peut quand même s'étonner que 75 d'entre eux aient été conservés dans les écoles dans une période aussi cruciale.

Un dérivé plus puissant, le PZL 43, fut construit pour la Bulgarie avec un moteur Gnome et Rhône 14 N 01 de 950 Cv. 




PZL 43 A Bulgare


Ce moteur plus lourd nécessita un allongement du fuselage qui se révéla très bénéfique pour les qualités de vol.


Il atteignait 370 km/h à 4 000 m et montait nettement plus vite - 4 000 m en 12 minutes - et plus haut - 8 500 m - que son prédécesseur.


Le manque de lucidité (ou la corruption...) des hauts responsables politiques Polonais, aveugles face à la montée du risque de guerre avec l'Allemagne, fit que les 36 premiers exemplaires construits furent livrés à la Bulgarie dans les mois qui précédèrent immédiatement la guerre, alors que l'Aviation Polonaise avait pourtant demandé leur réquisition...




Le meilleur de tous les avions Polonais fut le PZL 37 Los (Elan), un bombardier bimoteur de la classe des B 4 français.

C'était un avion de moins de 5 tonnes de masse à vide et de 9 tonnes de masse au décollage.


Le profilage en était soigné, sauf pour les capots-moteurs.


La voilure de 54 m² assurait une bonne portance puisque ce bombardier pouvait emporter jusqu'à 2 500 kg de bombes pour des missions totalisant 1 500 km ou un peu moins de 1 800 kg de bombes sur 2 600 km.


Il avait sacrifié, lui aussi, à la mode des empennages bi-dérives, qui provoquèrent huit crash (!).







Par contre, l'avion avait un armement réduit à juste 3 mitrailleuses de petit calibre, ce qui était très insuffisant.


La vitesse de pointe était de 445 km/h à 3 400 m avec un moteur Bristol Pegasus XX de 910 Cv. 

Le plafond pratique était inférieur à 6 000 m.


Inexplicablement, bien que 92 exemplaires de cette variante, dite B, aient été construits, moins de 50 furent utilisés opérationnellement.

Avec le moteur Gnome et Rhône 14 N 21 de 1 030 Cv à 4 600 m, la vitesse passait à 460 km/h et le plafond pratique gagnait 2 000 m. 

Contrepartie logique de l'augmentation de puissance, l'autonomie ne dépassait plus alors les 1 600 km.
Mais cette version prometteuse n'eut pas le temps d'être produite en série.


L'Aviation Polonaise en action

L'Aviation Polonaise (Lotnictwo Wojskowe) est entrée en guerre avec un peu plus de 310 avions opérationnels. 

La Luftwaffe, pour sa part, disposait de 1 500 avions dont 500 chasseurs et 350 Junkers 87 Stuka.


La DCA Polonaise comptait seulement 500 pièces (pour mémoire, la DCA Française, dont l'insuffisance fut pourtant évidente, en comptait 4 300 soit plus de 8 fois plus !).


Les Polonais eurent au moins une grande satisfaction au début de la Campagne de Pologne.

A la différence de ce que connurent les Alliés à l'Ouest en 1940, ils souffrirent peu des bombardements systématiques des aérodromes par les Allemands.

C'était parce qu'ils avaient évacué les aérodromes habituels et installé leurs avions dans des aérodromes secrets parfaitement camouflés.


Ce fut efficace et explique la présence active de l'Aviation Polonaise pendant une bonne partie de la Campagne, malgré une totale maîtrise de l'air Allemande.



Il faut rappeler que la partie invasive proprement dite de l'offensive Allemande dura seulement 18 jours, même si de multiples actions de résistance la prolongèrent jusqu'à la fin de la première semaine d'Octobre 1939.


L'entrée de l'Armée soviétique en Pologne ayant commencée le 17 Septembre 1939, il est facile de voir à quel point que cette invasion soviétique sur les arrières a été décisive pour achever la Pologne.


Sur l'ensemble de la campagne, les Polonais revendiquèrent plus de 250 avions Allemands abattus, ce qui correspond aux documents Allemands des pertes en combat. 


Les PZL 11 C ont épinglé 110 victoires aériennes pour des pertes de l'ordre de 100 avions, toutes causes confondues. 



Les bombardiers Polonais, de quelque types qu'ils fussent, volèrent très souvent mais bien évidemment sans escorte sérieuse.

En effet, lorsque vous avez très peu de chasseurs, vous êtes confronté à plusieurs nécessités indépendantes :
  • La protection de vos forces armées face aux avions de bombardement ennemis. 
  • La protection de votre population, de vos voies de communications et de vos organes de commandement (ce qui n'a rien à voir avec le problème précédent).
  • La protection de vos propres avions de reconnaissance et de bombardement.

Là-dessus, quand l'ennemi :
  • met en œuvre 5 fois plus de chasseurs que vous, 
  • que tous ces chasseurs sont considérablement mieux armés et plus rapides que les vôtres, 
  • que ses bombardiers peuvent laisser sur place vos chasseurs, 
sa maîtrise de l'air est indiscutable dès la fin du premier jour !



Les PZL 23 Karas furent lancés au combat à la fois pour des reconnaissance, devenues rapidement offensives, et pour le bombardement. 


Environ 120 furent employés. 

Il est dit (Wikipedia en langue Anglaise) que 110 autres Karas étaient employés en école, mis en réserve ou en cours de réparation.


La même source dit aussi que 23 exemplaires furent perdus avant guerre sur des crash et que le total de la production fut de 250, en dehors des 3 prototypes.


Un Karas isolé attaqua même, le 2 Septembre 1939, une usine Allemande dans la ville Silésienne de Ohlau (devenue Olawa en 1945). 

Ce fut ainsi cet avion qui lança les premières bombes Alliées sur le territoire du IIIème Reich.

La brigade de bombardement Polonaise comptait 50 Karas qui,
 sans escorte et à basse altitude, attaquèrent les colonnes blindées Allemandes. 

Ils furent rapidement imités par les 70 Karas de reconnaissance.


Au total, ils auraient lancé de 64 à 72 tonnes de bombes.


La lenteur et le manque de maniabilité de ces avions, comme leurs conditions d'emploi expliquent un bilan très sombre, avec la perte de 120 avions (soit plus de 85% de pertes). 


Vingt et un exemplaires survécurent à cette bataille en se réfugiant en Roumanie.




En ce qui concerne les PZL 37 bimoteurs, entre le 1er et le 16 Septembre, 46 appareils agirent essentiellement par groupes de seulement 3 avions, disposition totalement inefficace - faible capacité d'autodéfense, voir ce post - mais fréquente chez les Alliés à cette époque.


Ils attaquèrent courageusement les concentrations de troupes Allemandes mais aucune cible en Allemagne, alors que cette mission leur était promise depuis le début et qu'ils y eussent été bien plus à l'aise que des Karas.


Ces bombardiers réussirent à délivrer 110 tonnes de bombes à l'ennemi, ce qui n'était pas ridicule du tout, surtout si on tient compte du fait que la charge maximale de bombes emmenée depuis les aérodromes secrets (= opérationnels) passait de 2500 kg à 800 kg. 


Les pertes en PZL 37 directement dues à l'ennemi pendant les combats furent de l'ordre de 15 avions, dont 10 par la Chasse Allemande. 


A cela s'ajoutent 20 avions détruits au sol.

Parmi ces derniers, 18 appartenaient aux réserves et dormaient gentiment alignés sur un parking ! 


Ce souci de garder de grosses réserves, général chez les Alliés et stigmate de la Grande Guerre, était ridicule : Mieux vaut toujours faire combattre les avions que de les perdre inutilement au sol. 









Vingt-six de ces bombardiers Los se réfugièrent en Roumanie, nombre supérieur à celui des Karas qui purent en faire autant. 


Comme l'effectif des Karas produits était double de celui des Los, cela illustre parfaitement la meilleure capacité de survie de ces derniers, ce qui était prévisible au vu de leurs performances et de leur fiabilité supérieures. 
Mais on ne peut éliminer aussi que les pilote de chasse Allemands aient pu les prendre pour des avions soviétiques donc alliés à eux.



Conclusion


La défaite Polonaise fut (une fois éliminé les erreurs impardonnables de jugement en politique internationale), la défaite de son infanterie et de son artillerie. 

Elle découlait, entre autre, de son infériorité en puissance de feu par rapport aux Allemands de l'ordre de 1 à 5 pour l'artillerie d'une seule division d'infanterie !

A l'image de la défaite des Alliés en Juin 1940, elle est bien sûr une défaite du commandement. Mais celle-là est plus énorme encore que les nôtres, c'est dire.

L'aviation Polonaise était ridiculement sous-développée en terme d'effectifs et de performances.

Du coup, la Chasse fut quasiment absente de la bataille - par manque d'avions - alors que le niveau de ses pilotes était excellent, comme l'ont démontré, tour à tour, le palmarès du groupe de chasse I/145 Varsovie, puis l'ensemble des Polish squadrons de la RAF.



On ne peut surtout pas, cependant, exonérer feu le ministre des affaires étrangère Polonais, le colonel Beck, de ce désastre. 


En signant un pacte de non-agression avec Hitler, puis en trahissant la Tchéco-Slovaquie en 1938, il tuait un allié solide et bien armé et donc son propre pays, qu'il livrait à la fois à Hitler et à Staline


Je sais que certains politiciens Polonais du XXI ème siècle font tout pour le réhabiliter. 

Il ne le mérite en aucune manière. 

Alors, pourquoi diable tenter de le réhabiliter ?