vendredi 22 décembre 2017

Préparation du Blitz Krieg par le général Guderian et rôle de la Luftwaffe (Enrichi le 11 / 09 / 2024 *** ***)

{Source : A la tête des Panzers : Souvenirs d'un soldat, traduction Française de François Courtet et Leclerc-Kohler de Erinnerungen eines Soldaten du General-oberst Heinz Guderian.

Ce général était sorti de la grande Guerre en tant qu'officier d'état-major, issu du régiment des chasseurs de Goslar, une unité d'infanterie. Il n'avait pas de passion particulière pour la mécanique. 

En 1922, il fut affecté à l'organisation du transport automobile de la nouvelle armée Allemande de la République de Weimar (dite Armée de 100 000 hommes). 

Se préoccupant de la sécurité des soldats qui devraient être transportés par ses camions, il porta son intérêt sur les chars et fit réaliser des chars factices qui en avaient l'aspect mais pas les capacités de franchissement.

Il put commencer à comprendre, vers 1929, comment  les chars devaient s'intégrer avec toutes les autres armes.
Avec le général Lutz, il créa les premières divisions de Panzer. }



Le contexte


Pour notre malheur, le général Guderian fut vraiment un des tout meilleurs généraux du IIIème Reich

Au moment qui m'intéresse, il venait de jouer un rôle important dans la Campagne de Pologne avec son XIXème Corps d'Armée et ses unités blindées bien entraînées. 

Il avait permis de résoudre un certain nombre de situations susceptibles de bloquer l'offensive Allemande.

Après cette première victoire, obtenue en un peu plus de cinq semaines, Hitler avait décidé de passer à la suite de son programme. 

Il avait chargé le général Halder et l'OKH (Oberkommando des Heeres = commandement suprême de l'Armée de Terre Allemande), de préparer cette nouvelle offensive contre la France

Certains s'offusqueront peut être que je n'écrive pas "contre les Alliés". Mais Hitler avait clairement défini ses buts de guerre dans son livre-programme "Mein Kampf" : D'abord abattre la France, ensuite coloniser la Russie. 

Attaquer l'Angleterre ne l'attirait pas, les Anglais - en cas de victoire Allemande - bénéficiant d'un traitement à part.


{Le dictateur Allemand eut d'autant plus facilité à ignorer la Grande Bretagne que, en 1938, elle ne disposait d'aucune force projetable pour ce que l'on appellerait de nos jours une guerre symétrique. 
  • Elle ne disposait d'aucun char digne de ce nom (les 1700 chars Vickers Mk VI produits depuis 1936 n'étaient armées que de mitrailleuses et n'étaient blindés qu'à 14 mm...). 
  • Le nombre de ses soldats mobilisables était faible - pas de conscription - et en 1939, elle projeta 12 divisions en France, la moitié de ce que la Belgique avait mobilisé.
  • Elle ne disposait d'aucune arme anti-char puisque, en 1939, il lui fut nécessaire d'acheter des canon de 25 mm à notre pays... 
Par ailleurs, son aviation était encore majoritairement composée d'avions obsolètes (Gloster Gladiator) et la fabrication des avions modernes (Spitfire, voire Hurricane) tardait à démarrer.}



Hitler, quant à lui, ne se préoccupait que des pays qui risquaient de lui poser de vrais problèmes militaires. 

Bien renseigné sur l'équipement de l'armée Néerlandaise, les Pays-Bas lui paraissaient faciles à conquérir.

La division linguistique de la Belgique, comme la déclaration de la neutralité de leur pays, favorisaient amplement ses desseins, puisque cette neutralité interdisait aux Belges de préparer une coordination avec les Alliés.

Les généraux de l'OKH reprirent donc le plan Schlieffen qu'ils connaissaient parfaitement et dont ils estimaient que Guillaume II et von Moltke n'avaient pas vraiment tiré partie. 





Plan  Schlieffen de 1905 - Les places fortes Françaises (ou Belges)sont les surfaces en bleu-gris, les places fortes Allemandes sont colorées en vieux-rose. Les mouvements des armées Allemandes dessinent les flèches rouges. 
Cette représentation est parfois considérée comme erronée. Mais elle a le privilège d'une grande clarté.


Dans une vision hyper simplifiée, donc caricaturale, ce plan (version de 1905) visait à mettre le gros des armées Françaises entre une enclume, constituée des 6ème, 7ème et 8ème armées Allemandes (probablement placées en défensive après une courte avancée), et un marteau réunissant les 2ème, 3ème,4ème, 5ème armées. 

La 1ère armée Allemande servait - apparemment - de couverture contre d'éventuelles forces Alliées placées à l'Ouest. L'ampleur de son mouvement, de près de 800 km, devait paraître toutefois bien optimiste à un moment (même en 1914) où la motorisation était encore bien peu importante. 

Ce fut d'ailleurs cette première armée Allemande, commandée par von Kluck, qui fut battue sur la Marne grâce à l'intelligence pénétrante du maréchal Joseph Gallieni, qui eut l'immense mérite de voir, en premier, l'ouverture qui béait devant notre armée. Joffre, ensuite, n'eut qu'à exécuter, et il le fit bien.

Rappelons que, quelque soit le combat, entre deux individus ou entre deux armées, c'est toujours la perception rapide d'une ouverture dans les défenses adverses qui permet de gagner.
Le Führer connaissait bien les diverses variantes de ce plan et le refusa. 



Manstein renverse Schlieffen

En Novembre 1939 commença donc cette nouvelle phase : L'élaboration de l'offensive contre la France.

Le général Erich von Manstein, chef d'état-major de von Rundstedt (commandant du groupe d'armées A), convoqua Guderian à son QG. 

Son nouveau plan inversait le plan Schlieffen. Il proposait d'utiliser de puissantes forces blindées pour traverser rapidement le Luxembourg et la Wallonie pour atteindre Sedan et y percer la Ligne Maginot dite "prolongée" (moins dissuasive).

D'autres forces venaient initialement se positionner au Nord de la Belgique. 

Elles jouaient alors le rôle d'élément de diversion puis servaient ensuite d'enclume.

Il avait besoin de l'avis du meilleur expert Allemand en matière de chars pour être sûr que les Ardennes puissent être franchies rapidement.

Guderian était justement cet expert  et, après un examen minutieux des cartes, il vit que l'opération était tout à fait réalisable, à condition toutefois d'y employer toutes les unités blindées disponibles de la Wehrmacht.

A ce point de ce récit, il me faut souligner que le plan de von Manstein ne proposait, en quelque sorte, qu'un ouvre-boite pour percer la Ligne Maginot.

Le plan une fois mis au point, fut approuvé par le général von Rundstedt puis envoyé à l'OKH le 4  Décembre 1939.


La réception par l'OKH en fut, par contre, très négative, soit par conservatisme et admiration du plan Schlieffen (qui avait quand même sérieusement bousculé les armées Alliées en Août 1914), soit parce que les généraux de cet état major craignaient que la mise en route d'un tel plan pendant l'hiver 1939-1940 puisse donner aux Alliés des occasions de museler très rapidement la Wehrmacht (comme ce fut le cas de l'offensive von Rundstedt du 16 Décembre 1944).

Malheureusement pour nous, le 10 Janvier 1940, un officier de la Luftwaffe, porteur de la nouvelle mouture du plan Schlieffen et qui s'était égaré avec son avion (Bf 108 Taifun), fut obligé de se poser en Belgique. L'officier étant fait prisonnier, les documents qu'il transportait furent considérés comme tombés aux mains des Alliés (ce qui était bien le cas).

Le plan de l'OKH devait donc nécessairement être abandonné et Hitler poussa à l'adoption du plan Manstein, dont il était enfin informé.


Mise en place

Un Kriegspiel se tint donc à Coblence le 7 Février 1940. 

Guderian y proposa d'emblée "d'attaquer et de franchir la Meuse et de la franchir près de Sedan, le 5ème jour de la campagne, avec de puissantes forces blindées et motorisées, en se fixant pour objectif de réaliser une percée et d'élargir ensuite celle-ci en direction d'Amiens." 

Halder, chef d'état major général, trouvait cette idée absurde : Son nouveau plan impliquait bien d'arriver sur la Meuse, mais prudemment et, au mieux, vers le neuvième jour. 
Là, il aurait attendu l'arrivée de l'infanterie pour lancer une offensive 
"homogène" qu'il baptisait "attaque générale coordonnée". 

{Cela n'empêche pas certains auteurs de continuer à attribuer la victoire Allemande de Juin 1940 au général Halder, ce qui
, à l'évidence, est une contre-vérité.}

Guderian riposta vivement "en soulignant qu'il s'agissait de faire intervenir au point décisif, par surprise et en la concentrant, la puissance de choc de tous les chars disponibles, puis d'articuler ce coin suffisamment en profondeur pour ne 
pas avoir à s'inquiéter des flancs." 

En cas de succès initial, l'exploitation (= conquête de la région protégée jusque là) pouvait alors commencer immédiatement sans tenir compte des divisions d'infanterie.

Les estimations de Guderian sur la médiocre valeur des fortifications frontalières Françaises de la zone de Sedan furent confirmées "par les études minutieuses du major von Stiotta , conseiller du Génie au Groupe d'Armées.

M. von Stiotta s'appuyait essentiellement sur une exploitation très précise des photos aériennes, c'est pourquoi il fut impossible de réfuter ses arguments."


Le 14 Février, un nouveau Kriegspiel fut réalisé à Mayen devant Halder pour débattre du combat à mener pour réussir le franchissement de la Meuse. 

La première question était : Les divisions blindées devaient-elles alors franchir la Meuse par leur propres moyens ou devaient-elles plutôt être relevées par les unités d'Infanterie ?

Guderian et son collègue von Wietersheim déclarèrent que, dans ce dernier cas, ils n'accordaient aucune confiance dans la conduite de l'entreprise et qu'un emploi aussi stupide des chars ne manquerait pas de provoquer une crise du commandement.

La question du commandement des unités de Panzer fut particulièrement délicate. Le général von Kleist fut choisi au grand dam de l'auteur de ces mémoires qui lui reprochait de ne s'y être jamais intéressé jusque là.

Cependant, c'était bien le XIXème Corps d'Armée blindé de Guderian qui était chargé de l'attaque sur les Ardennes. 
Il commandait 3 divisions de Panzer (1ère, 2ème et 10ème), le "régiment" d'infanterie motorisée d'élite Gross Deutschland et nombre d'excellentes unités d'artillerie.


Une conférence des commandants d'armées impliqués dans cette offensive eut lieu le 15 Mars 1940 à Berlin, avec son nouveau supérieur von Kleist, et en présence d'Hitler.

Guderian y parla en dernier.

Il expliqua que ses troupes franchiraient la frontière du Luxembourg au jour J, avanceraient en trois colonnes vers Sedan par le Sud de la Belgique, passeraient la Semois le troisième jour, atteindraient la Meuse le quatrième jour et attaqueraient le cinquième jour pour établir une solide tête de pont sur ce fleuve.

Hitler lui posa alors la question fondamentale : "Et ensuite, que voulez-vous faire ?". 
Curieusement, cette question n'avait jamais été posé jusque là.

Guderian répondit : "En l'absence d'ordre contraire, je continuerai le lendemain ma poussée en direction de l'Ouest. 

Le Commandement suprême aura à décider s'il faut la mener vers Amiens ou vers Paris. 
A mon avis, la direction de poussée la plus efficace passe par Amiens jusqu'à la Manche."

Littéralement épuisé par l'âpreté des débats, il dût prendre du repos pendant la seconde moitié du mois de Mars.

Il souligne peu après dans ses mémoires qu'aucun autre ordre ne lui fut donné quant à la suite à donner au franchissement de la Meuse. 

Cette brillante intuition fut donc la sienne propre. 

Ceci est entièrement confirmé par l'excellent article de Many Souffan (in  Les Henschel 126 du 14 Mai 1940, Avions # 177, Sept. Oct. 2010, p. 26), je cite :
"Ces quatre victoires du GC III/7 sont irréfutables de par la concordance entre les documents Français et les documents Allemands. Si tous ces HS 126 sont présents à ce moment-là, c'est parce que, sans en référer à ses supérieurs, Guderian à décidé de faire progresser son offensive vers l'Ouest, en direction de la Manche.  
Les HS 126 lui permettent de connaître en temps réel la position de ses ennemis, la topographie, les difficultés à venir. Ce qui s'est passé ce 14 Mai entre 1200 et 1400  n'est que l'amorce du coup de faucille du plan Allemand, mis en place par la seule volonté de Guderian."

Guderian mit toute son ardeur à former ses généraux et ses officiers d'état-major à l'impressionnante mission qui les attendait.

Les choix tactiques du commandement Français le confortaient dans la justesse de ses options : "Expériences de la guerre de position, valeur éminente du feu, sous-estimation du mouvement."


Importance du renseignement - notamment aérien - dans l'élaboration du plan 


Guderian rajoute cette analyse : "Jusqu'au Printemps 1940, nous avions réussi, du côté Allemand, à nous renseigner clairement sur le dispositif ennemi  et sur ses fortifications

Nous savions qu'entre Montmédy et Sedan, la très puissante Ligne Maginot faisait place à un système bien plus faible
Nous nommions "Ligne Maginot prolongée" les ouvrages situés entre Sedan et la Manche.

Nous avions aussi reconnu le tracé et la puissance des fortifications Hollandaises et Belges. Elles étaient uniquement dirigées contre l'Allemagne.

Alors que la Ligne Maginot était faiblement occupée, le gros de l'armée Française, y compris les divisions blindées, et le corps expéditionnaire Britannique dans les Flandres Françaises, étaient concentrées entre la Meuse et la Manche, le front [tourné] au Nord-Est.

Par contre les troupes Belges et Hollandaises étaient articulées pour protéger leurs pays contre une attaque venue de l'Est.

Cette articulation des forces faisait conclure que l'ennemi comptait que les Allemands exécuteraient encore une fois le plan Schlieffen de 1914 et que le gros des armées Alliées était destiné à prévenir cet enveloppement en avançant à travers la Hollande et la Belgique.

 Autour de la charnière de ce mouvement vers la Belgique, on ne discernait la mise en place d'aucune couverture suffisante, sous la forme de réserves situées, par exemple, dans la région de Charleville ou de Verdun.
(...)
On pouvait déduire qu'un coup porté par surprise, droit au but, avec de puissants éléments blindés, par Sedan sur Amiens et la Manche, atteindrait en profondeur le flanc de l'adversaire engagé dans une avance à travers la Belgique (...). 
L'opération avait donc de fortes chances de réussir."



Du bon usage des bombardiers

Il est facile de comprendre que les photographies aériennes Allemandes (obtenues par des Dornier 215)  avaient permis l'analyse des ouvrages défensifs Alliés et de savoir que la finition des ouvrages Français sur la Meuse était encore incomplète.

Guderian perfectionna alors sa coopération avec la Luftwaffe dont la partie précédente de cet article montre en quelle estime il la tenait et avec quelle confiance il en avait utilisé les renseignements. 

Il en invita les deux généraux responsables (von Stutterheim pour l'aviation d'appui au sol et Loerzer pour le corps aérien) à assister à un Kriegspiel avec son propre état-major et participa lui-même à un Kriegspiel de la Luftwaffe dirigé par Loerzer.

Là, ils convinrent "d'un commun accord, d'étendre l'intervention de l'aviation à toute la durée du franchissement au lieu de faire exécuter un coup unique et concentré par les bombardiers et les Stukas.

Par des attaques répétées et des menaces d'attaques, nous voulions paralyser, dès le début de l'entreprise, les batteries ennemies (...).

Cependant, deux jour après avoir commencé son offensive, Guderian fut convoqué au QG de von Kleist pour y recevoir l'ordre de franchir la Meuse dans la foulée de son attaque sur Sedan, ce qui était dans l'esprit même de son attaque.

Par contre, à la suite d'une intervention du général Sperrle, de la Luftwaffe, von Kleist informa Guderian que l'établissement de la tête de pont sur la rive gauche de la Meuse serait précédé par un puissant mais unique bombardement.

Le chef du XIXème corps d'armée blindé n'arriva pas à faire rapporter cet ordre. 

Le 13 Mai, à 16:00, l'attaque sur la Meuse commença. 

Les aviateurs Allemands commencèrent leur intervention, mais, à la grande surprise de Guderian, ils procédèrent comme cela avait été décidé lors du Kriegspiel de la Luftwaffe dirigé par Loerzer. 

En fait, cette action aérienne brillante fut maintenue par Loerzer lui-même qui bloqua la transmission de l'ordre de Sperrle aux unités de bombardiers et de Stukas.

L'artillerie Française, dépourvue de couverture aérienne digne de ce nom, et qui n'avait jamais été entraînée à travailler sous la menace des bombardiers, fut incapable de jouer son rôle.
En conséquence, la percée de Guderian fut une grande réussite qu'une exploitation aussi rapide qu'instantanée lui permit de transformer en victoire éclatante.



Pour tous ceux qui veulent une vision plus globale sur l'attaque Allemande et les réactions Françaises, le premier commentaire sur le présent article (de Mr Dalot) est une synthèse saisissante dont je vous conseille la lecture.



Conclusions

La réussite du plan de Guderian et de Manstein reposa sur beaucoup de facteurs qui concernèrent les deux parties.

1 - Pour les Allemands :
  • Il allait de soi que la diversion Allemande vers les Pays Bas crédibilisait l'intuition de Gamelin que la France serait attaquée par une nouveau plan Schlieffen. La pression hystérique Britannique à propos du port d'Anvers renforçait encore cette impression.
  • Le général Guderian avait passé une partie du début de sa vie militaire dans la Lorraine annexée (en 1871). Il connaissait donc très bien la topographie de la région entière. Son attaque par les Ardennes, avec 3 divisions de Panzers parue faible à Gamelin, alors qu'elle portait tout le poids de l'attaque car ses hommes - qui disposaient d'un millier de chars - étaient remarquablement entraînés à surmonter toutes les situations critiques et que son infanterie motorisée était une troupe d'élite.
  • L'entraînement avait beaucoup porté sur la rapidité d'exécution des ordres et sur la fiabilité des éléments blindés qui devaient pouvoir être rapidement réparés en cas de panne. Quand une attaque était programmée pour 16:00, elle commençait à cette heure précise, même si plusieurs armes différentes devaient y contribuer simultanément.

2 - Pour les Alliés : 

  • J'ai déjà lourdement insisté sur l'incompétence de ceux qui avaient choisi le lent Morane 406 comme chasseur standard en lieu et place du Nieuport 161.
    • Ce dernier avion mettait 50 km/h dans la vue et grimpait à 8 000 m (là où volaient les Dornier Do 215 de reconnaissance Allemands) en moins de 11 minutes au lieu des 18 minutes nécessaires au MS 406 pour monter 1 000 m plus bas.
  • Je n'ai connaissance d'aucun exercice commun entre les troupes Britanniques et Françaises. Il était alors difficile d'imaginer un bon travail d'ensemble.
  • L'état-major Français appliqua mécaniquement (= sans pertinence) le plan Dyle-Breda en y apportant une très grande diligence (Breda étant atteint par nos troupes pendant la nuit du 10 au 11 Mai).
    • Du coup, la VIIème armée de Giraud, la plus puissante des armées Alliées, avec sa 1ère DLM et ses 2 divisions d'infanterie motorisée, fut envoyée dans ce qui se révéla être, littéralement, une nasse qui absorba toute sa force d'impact, comme celle de la 1ère Armée Française, plus au Sud-Est, le tout se terminant par la Bataille de Dunkerque où nous perdîmes de l'ordre de 10 000 morts et 35 000 prisonniers.
  • Les divers chefs d'armées terrestres Françaises se refusèrent de croire leurs observateurs aériens et envoyèrent les faibles effectifs de nos forces aériennes d'assaut se perdre dans des opérations sans aucun intérêt (en Zélande ou à Tongres par exemple).
  • Les chefs du bombardement de nuit Français acceptèrent d'envoyer sur l'Allemagne des bombardiers chargés de tracts (!). 
    • Une telle attitude pouvait, à l'extrême rigueur, se comprendre pendant la Drôle de Guerre. 
    • De mon point de vue, elle était inacceptable dès lors que l'offensive Allemande avait commencé. Pendant ce temps-là, ces avions et leurs excellents équipages étaient, bien sûr, indisponibles pour répondre à un éventuel besoin de porter des coups en cas d'offensive Germanique ! 



Document de l'auteur - vue très simplifiée de la manœuvre Dyle-Breda - en rouge plein : les troupes Françaises et Britanniques au départ - en rouge pointillé gras : Les mêmes à l'arrivée (supposée)



3 - Plus particulièrement pour les Français :

La lecture des témoins Français de la Campagne de France montre deux phénomènes apparemment contradictoires :
  • La difficulté de synchroniser de nombreuses unités pour lancer une attaque à un moment précis a entraîné un manque de confiance réciproque entre les divers acteurs. Il ne peut s'agir que d'un problème d'entraînement.
  • Les "tirs amis" existent dans tous les conflits armés et dans tous les camps. Dans certains cas, ils découlent d'une mauvaise identification du matériel aggravée par le stress induit par le combat. 
    • Cette mauvaise identification est favorisée en cas d'entraînements insuffisants. 
    • Cependant, certains ordres Français bien trop rigides ont induit des pertes sévères qui ont favorisé l'avancée de l'ennemi, comme par exemple ceux qui empêchèrent des unités qui tenaient les rives Nord de la Basse Seine de traverser le fleuve à temps pour éviter d'être fait prisonnières et continuer de frapper les éléments avancés de la VIIème Panzer de Rommel.       
  • En fait, cela traduisait une très mauvaise formation et un très mauvais entraînement généralisé : Nous avions perdu beaucoup trop de cadres de très grande valeur entre 1914 et 1918. Parmi ceux qui restaient, une partie non négligeable ne croyaient pas aux valeurs de l'offensive et de la manœuvre.  

Cependant, le général Guderian ne reconnait qu'un seul véritable souci pendant son offensive entre le Luxembourg et Amiens : "Les jours suivants, De Gaulle nous demeura fidèle et réussit le 19 Mai à faire irruption avec quelques chars jusqu'à 2 kilomètres de mon P.C. avancé dans la forêt d'Holnon et qui n'était protégé que par quelques pièces antiaériennes de 20. Je vécu quelques heures d'inquiétude jusqu'à ce que ces menaçants visiteurs eussent fait demi-tour."










3 commentaires:

  1. Bonjour,
    Tout d'abord c'est toujours un plaisir de vous lire et j'attends avec impatience la parution des nouveaux articles. Je me permets de vous contacter afin de comprendre les raisons qui vous amènent restreindre l'offensive allemande au seul groupe de DB de Gudérian.

    En effet au même moment (donc le 12 mai) le 41e corps blindé de Reinhardt (6e et 8e DB)attaquent à Monthermé et Nouzonville tandis que le corps blindés de Hoth(5e et 7e DB)passent à l'attaque au niveau de Dinant.
    On voit donc que la 9e armée va devoir faire face à 4 divisions blindées allemandes alors que la deuxième armée française affrontera 3 DB.

    De plus, il est important de rappeler que la 9e armée va devoir réaliser une manoeuvre compliquée. En effet jusqu'au 10 mai elle occupe la Position de Résistance de Donchery à Hirson. Dès la manoeuvre Dyle lancée elle doit effectuer un mouvement tournant et s’aligner sur la Meuse de Donchery à Namurs.
    La Position de Résistance se confond avec la Meuse de Sedan à Revin puis oblique à l'ouest en direction de Hirson. Le saillant formé par la Meuse et par Givet n'est donc pas couvert par la PR. La manoeuvre Dyle implique donc, que sur les 6 divisons constituant l'armée Corap 5 vont devoir abandonner des positions parfaitement préparées pour des positions improvisées, inconnues et très mal équipées en fortifications. Cette situation peut se comprendre pour la partie des lignes en territoire belge par contre cela l'est moins pour la partie française (donc de Revin à Givet).
    En effet, la majorité de l'effort de construction de fortifications de campagne pendant toute la durée de la drôle de guerre va être localisée sur la PR et non sur les futures positions de la 9e armée.

    Cette dernière va donc recevoir l'attaque allemande sur des propositions très mal préparées et surtout dans le cadre d'une bataille de rencontre. Ce qui est en totale contradiction avec la doctrine française d'un front continu et organisé (plans de feux établis de longue date, unités connaissant parfaitement leur secteur, fortifications nombreuses et performantes, structure en profondeur et enfin des liaisons efficaces et résilientes).

    En ce qui concerne la deuxième armée, la situation est tout autre puisque celle-ci n'a aucun mouvement à effectuer dans le cadre du plan Dyle variante Breda, même si l'organisation du front va là aussi se montrer défaillante.

    Enfin dès le 15 mai la 9e armée a cessé d'exister en tant que corps constitué (ce qui n'est pas le cas de la 2e) et c'est bien sa destruction qui va entrainer le décrochage des troupes engagées en Belgique. La rupture du front a Sedan en soit n'a rien de catastrophique. Ce qui pose problème c'est l'incapacité de la deuxième armée à mettre en oeuvre une contre offensive efficace contre le flanc gauche du corps blindés de Guderian. Mais même si cette opération avait réussi cela n'aurait pas sauvé la 9e armée qui disparait sous les coups de butoir et des infiltrations des corps de Hoth et de Reinhardt.

    Le 15 mai la 6e DB allemande est à Montcornet (pénétration de 55km) et à Froidchapelle (43km) ce qui signifie que dès le 15 au soir les DB allemandes sont dans le dos de la 9e alors qu'au même moment la 10e DB combat à Stonne, les pointes de la 1e DB quant à elles sont à Bouvellemont (25km).

    Je ne cherche pas à minorer le rôle du 19e corps, seulement à rappeler que l'offensive du 12 mai ne se résume pas à Sedan et qu'il est nécessaire de rappeler les sacrifices héroiques consentis par les hommes de la 9e armée française mais aussi les défaillances malheureusement multiples.

    Cordialement

    Nicolas Dalot

    Cordialemenrt






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    1. Cher Nicolas, je vous remercie très sincèrement pour votre contribution toute entière.

      Mon article concerne l'élaboration du plan Manstein / Guderian.

      Le général Guderian a été le principal acteur de notre défaite et certains de mes lecteurs ont du mal à comprendre l'importance de l'interception des avions de reconnaissance Allemands entre le 1er Septembre 1939 et le 10 Mai 1940.

      Par chance, les mémoires de Guderian expliquant parfaitement à quel point il a tiré partie de ces reconnaissances, j'ai donc voulu qu'ils le comprennent aussi et qu'ils ne doutent pas de l'importance fondamentale d'une bonne vitesse ascensionnelle pour un avion de chasse, nécessairement amené à faire des missions d'interception.

      Napoléon Ier disait que la guerre était un art simple et tout d'exécution. Et, justement, Guderian a joué le rôle principal de cette partition.

      Guderian fut le juge de paix qui a vérifié la possibilité de franchir les Ardennes.
      Eut-il été d'un avis opposé, le plan Manstein n'aurait jamais été appliqué de cette manière.

      Mis au pied du mur, Guderian a parfaitement réalisé sa manœuvre à sa manière - ultra rapide (57 heures) - en fournissant même, à cet effet, des amphétamines à certains de ses hommes : Il s'est débrouillé pour laisser nos généraux dans le brouillard de guerre.

      Je rappelle que notre général Prételat avait anticipé, à l’Été 1938, une manœuvre Allemande débouchant sur sa 2ème armée. Les généraux Georges et Gamelin trouvèrent l'exercice "excessif" (Wikipédia sur Prételat)!

      Je souscrit absolument à tout ce que vous écrivez sur la stupidité du mouvement en avant de Corap.

      Le vrai rôle de Guderian fut d'avoir validé le plan Manstein et de lui avoir donné un contenu précis et minuté.

      A Stonne, le RIGD est tombé sur des soldats Français parfaitement efficaces encadré par des chefs réactifs, d'où la durée imprévue de la bataille.

      Et bonne année 2018 à vous !

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  2. Cher Drix,

    Je suis extrêmement touché par le compliment, surtout venant de vous. Mais je n'ai pas de mérite, j'ai eu la chance de lire des historiens de grande qualité.
    Au plaisir de vous lire.

    Nicolas Dalot



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