samedi 21 janvier 2012

Guerre de propagande et Histoire... (révisé 22 / 08 / 2023 * ***)

guerre et politique


(You can read the English version of this post: Click here)

La guerre a toujours été un élément de la politique de tous les pays du monde.

Le corollaire, c'est que la politique imprègne totalement la guerre. 

Si, du point de vue philosophique, le mot politique est particulièrement noble, il se dégrade le plus souvent dans les faits quotidiens au point de se confondre avec le mot propagande (et aussi avec le mot magouille)

Cette dérive intervient en général parce que le mot politique est employé par des politiciens, c'est à dire des gens qui, quelque soit leur discours, ne visent le pouvoir que pour bénéficier du confort qu'il apporte à leurs ego.
La IIème Guerre Mondiale est caractérisée par une extraordinaire inflation de cette propagande. 

Dans ce domaine, la France apparaît - à n'importe quel observateur de l'époque - d'une faiblesse infantile, non qu'elle n'en ait pas essayé d'en faire, mais parce que sa propagande n'avait aucune chance de toucher la bonne cible. 

Je la croyais entre les mains d'Alexis Leger, à la fois poète et homme de réseaux politiciens, disciple d'Aristide Briand, qui n'avait pas vraiment compris la nature du pouvoir nazi. 

Mais un de mes lecteurs m'a dit qu'elle était assurée par Jean Giraudoux, homme de lettre passionnément Germanophile... 
En réalité, la seule propagande décisive était alors la réussite militaire.



Nos politiciens assimilaient alors le nazisme au fascisme, comme c'est encore couramment, pratiqué encore de nos jours.
Pourtant, L'Italie ne s'est alliée à l'Allemagne qu'à cause de l'aveuglement de certains de nos propres hommes politiques.

Ces deux idéologies ne sont absolument pas superposables, l'Italie de Mussolini n'ayant pas créé, à ma connaissance, de camp d'extermination, sauf, peut-être, après l'arrestation puis le remise au pouvoir du Duce par le SS Skorzeny. 

Pour faire une propagande efficace, il faut connaître à fond la propagande ennemie, voire qui est visé et comment notre propagande peut agir.
Alors seulement, il est possible de définir les arguments et la manière d'écrire les arguments comme les actions connexes qui rendront la propagande ennemie caduque.


Le IIIème Reich, lui, était particulièrement fort dans ce domaine et cohérent avec ses buts qui étaient la germanisation et l'aryanisation totales de l'Europe depuis les Pyrénées jusqu'au Cap Nord à l'Ouest et au moins jusqu'à l'Oural à l'Est. 



Détruire la France, but de guerre n°1 d'Hitler

La destruction de la France était obligatoire dans cette stratégie. 

Notre Nation :
  • Avait déjà démontrée entre 1914 et 1918 qu'elle était une puissance militaire particulièrement dangereuse.
  • depuis le XVIIIème siècle, elle avait développé un certain nombre de concepts qui risquaient d'anéantir toute politique fondée sur l'inégalité entre les peuples, et qui étaient donc fondamentalement anti-racistes (bien qu'ils contredisent tout autant sa propre politique coloniale) ;
  • Notre peuple a un réel amour de la démocratie (même si la IIIème République est une démocratie médiocre puisque les femmes n'y ont pas le droit de vote et que les politiciens s'intéressent trop à satisfaire leurs appétits de pouvoir). 
Une simple victoire militaire ne suffisait pas à Hitler. 


Il lui fallait la destruction morale de la France.

Pour cela, il lui fallait trouver le moyen de nier tout ce qui fait ce pays, à commencer par son unité : Il allait reprendre l'Alsace et la Lorraine et exacerber tous les mouvements qui menaçaient son unité.

Mais il fallait aussi que le peuple Français soit humilié dans sa fierté culturelle, bien sûr, mais surtout guerrière. 

Il avait avec lui deux orfèvres de la guerre de mouvement : Guderian - théoricien et praticien des chars - et Rommel - le spécialiste des opérations risquées - 
(Vous avez dit : et von Manstein, alors ? 
OK, mais si celui-là détectait bien les points faibles, les deux autres étaient, en outre, des as sur le terrain).


Ainsi, Hitler va surprendre notre Etat-Major, le plus âgé du monde, que nos politiques avaient soigneusement "purgé" des militaires les plus aptes à révolutionner les méthodes, pour éviter d'être taxés de bellicistes par leurs amis Anglo-Saxons.


Les troupes Germaniques bousculèrent des forces peu et mal commandées qui essayaient sans succès de comprendre d'où venaient les coups. 

De ce fait, les moins bien entraînées parmi nos soldats connurent quelques moments de panique, voire de débandade. 


Hitler et son complice Goebbels vont en jouer brillamment en baladant des journalistes américains, donc "neutres", si facile à berner (ou, plutôt, si complaisants), là où les troupes Allemandes étaient passées et où peu de traces de combat étaient restées visibles.


Ainsi va naître cette légende - partagée depuis par certains hyper-faucons américains de l'ère de Georges W. Bush et Donald Rumsfeld - selon laquelle "les Français ne se sont pas battus" (in William Shirer, mon journal à Berlin, 1943). 


On montrera aussi d'interminables colonnes de prisonniers Français.

Nous savons, plus de 80 après, que les Français se sont battus, qu'à Stonne, les soldats d'élite de la division Gross Deutschland ont énormément souffert, qu'à Hannut et à Gembloux, les divisions de Panzers ont dû reculer devant nos hommes de IIème et IIIème DLM et qu'à Abbeville, la 4ème DCR du Colonel de Gaulle a provoqué une véritable débandade Allemande, etc...

La preuve du courage Français : Le succès de l'évacuation de Dunkerque rendu possible par l'abnégation de nos soldats (11 000 tués et 34 000 prisonniers qui ont induit 20000 pertes chez l'ennemi) et aussi nos 60 000 à 90 000 morts en 40 jours suivant les sources !

Curieusement, il n'y avait pas de journalistes "neutres" pour relater ces faits.

Evidemment, je suis loin de l'aviation !


1500 Messerschmitt 109 E perdus par simples accidents en 2 ans ? Mort de rire !

Justement, j'y reviens. 

Dans son livre Famous Fighters of the Second World War, must des années 60 dans ce domaine, William Green a écrit (dernier paragraphe de la p. 11 de l'édition en Français, MacDonald, 1960) que la tendance à embarquer (c.a.d. dévier brutalement du trajet de décollage / atterrissage prévu) du Messerschmitt Bf 109 E avait provoqué 1500 destructions d'avions de Septembre 1939 à Septembre 1941.

Alors comptons un peu. 


Les pertes officielles pour faits de guerre en Bf 109 sont de :
  •   67 avions en Pologne, 
  • 205 en France, 
  • 610 pendant la bataille d'Angleterre, ce qui donne un total partiel de 882 appareils pour la première année de guerre. 

Les pertes dans les Balkans et en Norvège, cumulées, sont :
  • 100 chasseurs,
Les pertes en Russie, avant l'hiver de 1941-42 sont annoncées faibles. Sur la période choisie, en estimant un taux de perte mensuel moitié moindre que celui de la bataille d'Angleterre, on pourrait évaluer ces pertes à :
  • 400 avions. 

Soit un total de pertes dues à l'ennemi de 1400 Messerschmitt 109.

Cela signifierait que la Luftwaffe aurait éprouvé moins de pertes à cause de ses ennemis que du fait de ses propres pilotes. C'est évidemment faux.

Je n'y crois absolument pas parce que tout pilote est particulièrement brillant - donc sûr - quand il vole beaucoup et c'était justement le cas des pilotes de chasse Allemands pendant la totalité de la période considérée. 

Seuls les pilotes qui manquent d'entraînement sont vraiment dangereux.

Par contre, beaucoup de pertes dues au combat ont pu être camouflées de cette façon, en particulier celles infligées par les Polonais, les Français et les Russes. 

Parce que du point de vue des dirigeants nazis, leurs adversaires ne pouvaient pas être égaux ou - pire - meilleurs que leurs héros.












6 commentaires:

  1. A vrai dire le Bf109 avait un problème légèrement gênant bien expliqué dans cette vidéo:
    https://www.youtube.com/watch?v=NnXpPNqtgXA

    RépondreSupprimer
  2. Un témoignage:
    Heinz KNOKE "La grande chasse" , J'ai lu bleu N°A81.1968, traduction Max Roth.
    Pages 24 et 25: 8 morts en escadrille-école, transformation sur BF109.
    "[...] dérape sur l'aile gauche [...], par la suite, je devais assister des centaines de fois à ces abattées foudroyantes. [...] débris, cadavre..."

    J'en profite pour saluer l'ensemble de votre travail qui répond à beaucoup de mes questions sur notre malédiction, période 1919-1939.

    RépondreSupprimer
  3. Ce genre d'accidents n'était pas exceptionnel, hélas. Le célèbre Clostermann rapporte des accidents au décollage ou à l’atterrissage particulièrement meurtriers et trop peu anecdotiques.
    On pourrait imaginer alors un score équivalent pour le Spitfire avec son étroite voie. Pourtant il n'en est rien alors que les pilotes de ces avions avaient en moyenne moins d'heures de vol que ceux des Me109. Guillaume

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La bonne méthode fut expliquée par Eric Hartmann à l'un de ses héritiers spirituels : Ne pas mettre les gaz à fond au début du décollage. Ce conseil fut également donné par Doret dans "trait d'union avec le ciel" à propos du D 550 de record.
      Qu'il y ait des accidents était inévitable (les aviateurs sont jeunes donc impatients), mais qu'ils soient plus nombreux que le nombre d'avions abattus par l'ennemi n'est pas crédible.

      Supprimer
  4. Bonjour,
    Il y a une petite erreur dans votre article, par ailleurs fort intéressant. Alexis Léger ne s'occupe pas de propagande mais de diplomatie. Vous confondez avec un autre "artiste" Jean Giraudoux, qui lui reçu en charge la propagande (commissaire de l'information pour être précis) et qui fut beaucoup moqué par le camps d'en face.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Mr Bonin de rectifier mon erreur. Du coup, cela m'explique mieux les erreurs de cette propagande, car, pour qu'un message passe dans la population que nous combattons, il faut connaître parfaitement son "âme" pour pouvoir lui faire mal. Or, il était depuis longtemps un ardent Germanophile...

      Supprimer