En ce début de XXIème siècle, il est banal de parler de la toute puissance des médias, et quoique les journalistes s'en défendent, elle est terriblement vérifiée.
Une presse libre est essentielle à la Démocratie, le seul vrai point négatif est donc totalement contenu dans l'adjectif libre.
Le mot libre est plus complexe à vérifier qu'il n'y paraît.
J'y reviendrai.
L'affaire du "pantalon national" : Le clientélisme a tué ou blessé 500 000 hommes en 2 mois
Je ne résiste pas à l'envie de reprendre une information donnée dans le remarquable livre de Pierre Servent, Le complexe de l'Autruche, chez Perrin.
Je vais, pour une fois, parler d'uniformes.
Là, nous repartons dans le passé, il y a plus d'un siècle, en 1911.
Nos fantassins étaient alors équipés de pantalons de couleur garance (photo ci-dessous : Les uniformes de sortie).
Le ministère de la Guerre Adolf Messimy, connaissait bien les évolutions de l'art militaire de ce début de XXème siècle marqué par la guerre Russo-Japonnaise et par la 1ère guerre des Boers (1881).
Dans ce dernier conflit, les uniformes kaki des Boers leur permirent un carnage de soldats Britanniques, vêtus de rouge (couleur choisie pour éviter que le sang se voit trop).
Par ailleurs, pendant la guerre Russo-Japonaise (1904-1905), les Russes réussirent une tactique défensive remarquable en développant l'emploi des tranchées autour de Port-Arthur, ce qui limita significativement leurs pertes.
Notre excellent ministre (je ne dis pas souvent cela, mais, là, je le pense pleinement) de cet immédiat avant-guerre fit tester des tenues réséda, couleur que je décrirais grossièrement comme un vert tirant un peu sur le jaune, donc assez proche du kaki, pendant les manœuvres d'Automne 1911.
(La revue GBM a publié un excellent article sur le sujet dans son n° 102 de 2012.)
Ce fut alors un tollé dans les journaux :
Dans ce dernier conflit, les uniformes kaki des Boers leur permirent un carnage de soldats Britanniques, vêtus de rouge (couleur choisie pour éviter que le sang se voit trop).
Par ailleurs, pendant la guerre Russo-Japonaise (1904-1905), les Russes réussirent une tactique défensive remarquable en développant l'emploi des tranchées autour de Port-Arthur, ce qui limita significativement leurs pertes.
Notre excellent ministre (je ne dis pas souvent cela, mais, là, je le pense pleinement) de cet immédiat avant-guerre fit tester des tenues réséda, couleur que je décrirais grossièrement comme un vert tirant un peu sur le jaune, donc assez proche du kaki, pendant les manœuvres d'Automne 1911.
(La revue GBM a publié un excellent article sur le sujet dans son n° 102 de 2012.)
Ce fut alors un tollé dans les journaux :
- On violait les grands principes républicains (rien que ça !!!),
- on abandonnait le pantalon national,
- nos soldats devenaient ridicules,
- les officiers perdaient leur autorité,
- le rouge est bien plus gai, etc....
C'était écrit dans les journaux, et, bien sûr, relayé par nos brillants parlementaires.
Alors que le fusil Lebel avait une portée déjà importante mais une densité de tir moins forte que celle du Mauser à chargeur (à cause d'un rechargement plus lent du magasin), il me semble que le bon sens citoyen aurait voulu que l'on équipe les soldats d'une tenue obligeant l'ennemi à s'approcher à moins de 100 m pour être en mesure de leur tirer dessus.
C'eut été, en quelque sorte, la furtivité du moment.
Ce refus imbécile de modifier les couleurs des vêtements destinés aux combats coûta un nombre de vie considérable.
La réaction fut du même ordre contre le casque d'acier.
C'était évidemment navrant.
Il fallut attendre Septembre 1915 (une année complète !) pour protéger la tête de nos soldats, toujours pour des raisons d'esthétique.
Le résultat : 300 000 soldats français tués et 600 000 blessés en 3 mois, 210 000 ayant péri entre la déclaration de guerre et la fin de la bataille de la Marne, dans le premier mois de guerre.
Rappelez-vous : La mort de chacun de nos soldats diminuait d'autant les pertes de l'ennemi Allemand.
Pour l'instant, mon propos est d'expliquer comment la IIIème République s'est ingéniée à gâcher son maigre argent dans des dépenses pharaoniques qui étaient militairement stupides.
La page visible ci-dessous date de fin 1936.
Certes, le Front Populaire venait de prendre le pouvoir..
Pousser vers les cuirassés - inutiles - quand Hitler mise sur l'Aviation et les Blindés !
Pour l'instant, mon propos est d'expliquer comment la IIIème République s'est ingéniée à gâcher son maigre argent dans des dépenses pharaoniques qui étaient militairement stupides.
La page visible ci-dessous date de fin 1936.
Collection personnelle de l'auteur, à partir de "La science et la vie" de Décembre 1936 - |
Certes, le Front Populaire venait de prendre le pouvoir..
Il avait lancé un train de réformes dont beaucoup avaient bien trop tardé (congés payés, 40 heures mais aussi d'autres, totalement négatives, comme les nationalisations de l'industrie aéronautique qui n'eurent aucun effet positif - sauf pour Adolphe Hitler).
Le 7 Mars 1936, Hitler avait remilitarisé la rive gauche du Rhin, mettant ses armées à nos frontières.
Dans le même temps, il mettait en place son corps cuirassé, son arme aérienne et ses "premiers" sous-marins.
A ma connaissance, Hitler n'était pas de l'autre côté d'un quelconque océan.
Notre Marine n'avait donc aucun moyen pour l'empêcher de nous nuire.
Elle avait juste été conçue pour assurer la pérennité de nos lignes maritimes avec nos colonies.
C'est là que l'on voit à quel point Clémenceau était un homme politique clairvoyant dans ses jeunes années, lorsqu'il luttait de toutes ses forces contre le colonialisme et les dépenses qu'il induisait pour la Nation, comme pour les colonisés aussi, d'ailleurs.
Le lobby maritime dans ses œuvres
Comme si de rien n'était, le rédacteur de l'article suivait un plan où la thèse (le cuirassé est indispensable) puis l'antithèse (mais les avions peuvent mettre le cuirassé en danger) alternaient presque correctement (du point de vue rhétorique d'un professeur de Français corrigeant une dissertation de seconde dans les années 60).Cependant, son siège était fait.
Alors que 4 cuirassés étaient déjà en voie d'achèvement et que le dernier d'entre eux (le Jean Bart) ne serait pas en service avant la fin de 1940 (quoique !), ce journaliste voulait un "corps de bataille cuirassé" étoffé de 2 divisions supplémentaires, soit 9 cuirassés au total, pour 1943.
Les Dunkerque, Strasbourg et Richelieu, lourds et bien plus puissants que les super-dreadnought de 1914, bourrés de technologies nouvelles et beaucoup mieux armés, étaient naturellement bien plus chers.
Chacun de ces mastodontes coûtait le prix de plus d'un millier d'avions de chasse avec toutes leurs pièces de rechange !
Alors qu'ils consommaient d'énormes quantités d'acier à très haute performance pour leur blindage, ils ne pouvaient jouer aucun rôle pour protéger nos frontière de la Wehrmacht, bien au contraire : L'acier spécial pour blindage a cruellement manqué aux fortifications de la région de Sedan en Mai 1940.
Dans la Marine aussi, l'Aviation était alors vue comme une menace lointaine, très lointaine, si lointaine, même, que mieux valait n'en point parler.
Le journaliste en question évoque l'existence de l'arme aérienne juste pour montrer qu'il n'est pas ignare dans ces nouvelles technologies...
C'est habile, mais il aurait dû être envoyé à l'île du Diable après la défaite de Juin 1940.
On avait pourtant déjà beaucoup donné à la Marine : 42% du budget militaire entre 1926 et 1936.
Mais ses chefs, à l'exception de 2 ou 3 (l'amiral Frochot, trop rapidement décédé, ou l'amiral de Laborde, qui ne prit de très mauvaises décisions en 1942 que par haine de Darlan, lequel avait été indûment favorisé à cause des liens entre son père et Georges Leygues), n'avaient pas une vue qui leur permettait d'anticiper l'avenir proche.
Ils n'avaient pas compris les leçons pourtant claires de la Grande Guerre.
La bataille du Jutland était déjà la démonstration que les cuirassés ne servaient à rien.
En effet, lorsque leur conception était saine, ils étaient incapables de conclure leurs combats.
Dans le cas contraire, par exemple celui des croiseurs de bataille Britanniques en 1917, ils sautaient à la moindre égratignure, tuant la totalité de leur (nombreux) équipage.
A la place des cuirassés, nos marins auraient dû développer la détection (acoustique) des torpilles et celle (électromagnétique) des avions.
Il fallait des escorteurs, des croiseurs antiaériens, des sous-marins, des avions et des porte-avions.
Quand ils commandaient des avions, nos marins voulaient des hydravions, et en particulier des hydravions à coque, 20% plus lourds que les avions à roulettes correspondants.
Parce que, de ce fait, leurs avions manquaient de finesse, ils volaient de 15 à 25 % moins vite que de "vrais" avions terrestres.
Quand ils commandaient des avions, nos marins voulaient des hydravions, et en particulier des hydravions à coque, 20% plus lourds que les avions à roulettes correspondants.
Parce que, de ce fait, leurs avions manquaient de finesse, ils volaient de 15 à 25 % moins vite que de "vrais" avions terrestres.
Ils étaient en conséquence des proies faciles pour les avions des porte-avions étrangers.
Dans le livre de Pierre Barjot (l'Aviation militaire Française en 1939), un chapitre nous éclaire sur ce goût pour l'hydravion à coque qui pouvait être vu comme un navire, avec des hommes y exerçant les mêmes fonctions, les prises de quart, etc... Ils étaient, bel et bien, des bateaux volants.
Pour les gens nés après 1960, cela se voit également dans les épisode de Star Treck !!!
Dans le chef des élites navales Françaises de l'entre-deux-guerres, comme pendant la Grande Guerre, la notion même d'avion de chasse ennemi n'était pas du tout prise en compte.
La Marine Impériale Japonaise a démontré, au moins dans la période allant du 7 Décembre 1941 au moins jusqu'au 3 Juin 1942 (Bataille de Midway), que cette conception était naïve, comme tout ce qui tend à imaginer qu'un pays est seul au monde.
Le problème n'est pas que les journalistes aient telle ou telle opinion politique, mais leurs articles - tout comme ceux des scientifiques - doivent se fonder sur la vérité, c'est à dire le respect d'une confrontation honnête avec le réel.
Il me faut souligner aussi que les journalistes des revues aéronautiques des années 30, eux, avaient en général très bien posé les questions militaires.
Si les décideurs politiques et militaires les avaient lus attentivement, ils auraient pris les décisions permettant de bloquer les armées Allemandes au bon moment, ce qui eu tout changé.
En 1914, les pantalons rouges se voyaient à plus d'un km, c'est la honte de nos députés du moment d'avoir osé empêcher les uniformes résédas de devenir la norme Française.
J'imagine bien qu'il y avait un problème industriel à la clé, mais cela pouvait se régler différemment, en jouant sur les tenues de sortie (qui auraient dû rester inchangées) ou sur la mode féminine !
Nos cuirassés étaient périmés dès que les avions et les sous-marins étaient devenus fiables.
Ne pas s'en être rendu compte implique que nos journalistes ne lisaient pas les résultats des combats navals.
Mais je n'imagine pas que ce soit le lobby de l'acier qui ait lancé ce texte sur les cuirassés, car l'acier à blindage était indispensable pour les fortifications de la ligne Maginot comme pour nos chars de combat, deux destinations qui furent plutôt mal servies.
Je dois dire que j'ai été choqué, il y a quelques années par un "travail" français qui reprenait en fait directement des documents publicitaires d'une firme américaine tout aussi largement surestimée qu'elle est célèbre à propos des avions furtifs.
Dans le chef des élites navales Françaises de l'entre-deux-guerres, comme pendant la Grande Guerre, la notion même d'avion de chasse ennemi n'était pas du tout prise en compte.
La Marine Impériale Japonaise a démontré, au moins dans la période allant du 7 Décembre 1941 au moins jusqu'au 3 Juin 1942 (Bataille de Midway), que cette conception était naïve, comme tout ce qui tend à imaginer qu'un pays est seul au monde.
En France, l'Armée de l'Air ne deviendra prioritaire qu'en 1939. Trois années trop tard...
Quant à notre Aéronavale, en 1940, elle dut faire avec ses très faibles moyens.
Les amis de Darlan passèrent la main et on finit par comprendre l'intérêt de l'Aéronavale, en 1947, pendant la Guerre d'Indochine.
Quant à notre Aéronavale, en 1940, elle dut faire avec ses très faibles moyens.
Les amis de Darlan passèrent la main et on finit par comprendre l'intérêt de l'Aéronavale, en 1947, pendant la Guerre d'Indochine.
Bougrement trop tard, le mal était fait !
Conclusion
La politisation de la presse passe - encore de nos jours - par ces postures théâtrales qui n'ont rien à voir avec la réalité des choses.Le problème n'est pas que les journalistes aient telle ou telle opinion politique, mais leurs articles - tout comme ceux des scientifiques - doivent se fonder sur la vérité, c'est à dire le respect d'une confrontation honnête avec le réel.
Il me faut souligner aussi que les journalistes des revues aéronautiques des années 30, eux, avaient en général très bien posé les questions militaires.
Si les décideurs politiques et militaires les avaient lus attentivement, ils auraient pris les décisions permettant de bloquer les armées Allemandes au bon moment, ce qui eu tout changé.
En 1914, les pantalons rouges se voyaient à plus d'un km, c'est la honte de nos députés du moment d'avoir osé empêcher les uniformes résédas de devenir la norme Française.
J'imagine bien qu'il y avait un problème industriel à la clé, mais cela pouvait se régler différemment, en jouant sur les tenues de sortie (qui auraient dû rester inchangées) ou sur la mode féminine !
Nos cuirassés étaient périmés dès que les avions et les sous-marins étaient devenus fiables.
Ne pas s'en être rendu compte implique que nos journalistes ne lisaient pas les résultats des combats navals.
Mais je n'imagine pas que ce soit le lobby de l'acier qui ait lancé ce texte sur les cuirassés, car l'acier à blindage était indispensable pour les fortifications de la ligne Maginot comme pour nos chars de combat, deux destinations qui furent plutôt mal servies.
Je dois dire que j'ai été choqué, il y a quelques années par un "travail" français qui reprenait en fait directement des documents publicitaires d'une firme américaine tout aussi largement surestimée qu'elle est célèbre à propos des avions furtifs.
Alors, oui, la furtivité peut être un avantage.
Mais cette capacité n'est jamais définitivement acquise.
Après, on oublie de dire au bon peuple qu'il va devoir payer les objets en questions.
Si l'intérêt de la chose consiste à frapper de loin sans être vu, le vrai problème est, avant tout, l'identification de la cible car rien n'est pire que de se tromper sur ce que l'on frappe et qui l'on frappe.
M'est avis que ce problème n'est pas aussi bien résolu que certains l'affirment.
Mais vous n'êtes pas obligés de me croire.
Après, on oublie de dire au bon peuple qu'il va devoir payer les objets en questions.
Si l'intérêt de la chose consiste à frapper de loin sans être vu, le vrai problème est, avant tout, l'identification de la cible car rien n'est pire que de se tromper sur ce que l'on frappe et qui l'on frappe.
M'est avis que ce problème n'est pas aussi bien résolu que certains l'affirment.
Mais vous n'êtes pas obligés de me croire.
Concernant le pantalon garance, cette vidéo pourrait vous intéresser : https://youtu.be/pkeoZwWsf24
RépondreSupprimerMerci pour cette excellente vidéo précise et claire.
RépondreSupprimerJ'en profite pour ajouter que, d'expérience personnelle, le drap bleu-horizon était d'une résistance exceptionnelle. Mon père était lieutenant dans une batterie de 155 mm en 1918. Il a été démobilisé en emmenant son uniforme. Ensuite, il a fait ses études supérieures de Géologie en France puis il est parti travailler au Maroc en tant que géologue. Il a épousée ma mère, également géologue et l'a emmenée sur le terrain à la fin de l'Eté 1944. Il lui fallait un vêtement de terrain.
La seule solution fut de tailler son vêtement dans l'uniforme de mon père.
Lorsque j'ai eu entre 7 et 8 ans, j'en ai hérité à mon tour et je peux dire que ce fut le premier vêtement que j'ai eu plaisir à porter : Il était inusable !
Mais j'ai grandi, et le vêtement a disparu de ma conscience.