vendredi 2 mars 2012

Le soulagement des pilotes enfin équipés du D 520 (Modifié le 17 / 09 / 2015)


Le Dewoitine D.520 fut incontestablement le meilleur avion de chasse entré en service dans l’Armée de l’Air française avant la défaite de Juin 1940.

  • Sa  capacité de croisière rapide  - 480 km/h - lui donnait un atout majeur bien après l’armistice de 1940. Cela a permis, en 1943, aux pilotes bulgares d'attaquer frontalement les B17 ou 24 en évitant les P 38 d’escorte, incomparablement plus rapides en pointe, mais tellement moins agiles. Il fallut des P 51 en 1944 pour les rendre inefficaces !
  • Sa vitesse ascensionnelle, moyenne jusqu’à 4 000 m, était très bonne (pour 1940) au-dessus - il gagnait une minute sur le Bf 109 E pour passer de 5 000m à 8 000m, à cause d’un compresseur de meilleure technologie (Szyldowski-Planiol S 39).
  • Sa vitesse de piqué (de l’ordre de 850 km/h) était un peu supérieure à celle du Bf 109E. Mais surtout, le D.520 restait nettement plus manœuvrable à très grande vitesse que le chasseur allemand. De là, des pilotes français - vétérans de 1940 - dirent à Danel et Cuny : "Un 109 qui s'enfuyait en piqué était mort."
  • Son très bon taux de roulis lui donnait un avantage indiscutable au début d’une manœuvre évasive ou lors d'une attaque en ciseau.  
  • Son autonomie et la fiabilité de son moteur lui permettaient de longs combats, des vols d’escortes ou des déplacements lointains sans réels problèmes : 
    • Traversée de la Méditerranée ; 
    • Evasion de pilotes de Toulouse jusqu'en Grande-Bretagne (!) ; 
    • Déplacement d'Algérie jusqu'en Syrie en trois étapes (Athène, Rodes, Alep), alors que ce déplacement aura des conséquences lourdes pour les bombardiers LéO 451 qui, en théorie, avaient la capacité de faire le même trajet en une seule étape). 


Le seul véritable défaut du D.520 était sa tendance au cheval de bois à l’atterrissage, conséquence d’une roulette de queue mal conçue, puisque non présente dans les 3 prototypes. 

Elle passa inaperçue des autres pilotes d'essai français qui, 
tous, avaient une longue habitude de faire rouler des chasseurs à trains étroits dépourvus de véritables amortisseurs sur des terrains que Jacques Lecarme décrivait comme particulièrement médiocres et bosselés. 
Quand l'analyse fut enfin faite correctement, bien trop tardivement, on bloqua la capacité d'orientation de cette roulette et le problème fut définitivement résolu.

En ce qui concerne le vol proprement dit, la grande majorité des témoignages de pilotes concordent sur la très bonne qualité du Dewoitine 520 en tant que chasseur.

Ceci est parfaitement illustré par le rapport du Colonel de Turenne, commandant le groupement de chasse 24 (in 13 Juin 1940, premières frappes en métropole, les combats franco-italiens, Batailles Aériennes n°11, 2000) :
Les D.520 employés pour la première fois par des pilotes confirmés et titulaires de plusieurs victoires ont montré qu'ils étaient rapides, maniables et permettaient des attaques faciles sur les avions de bombardement italiens. Toutefois, les pilotes signalent qu'il faut éviter de virer au moment du tir si l'on veut qu'il soit efficace, le D.520 dérapant en virage.
Les pilotes estiment que le tir au canon est très supérieur à celui des mitrailleuses. D'après leurs dires, le canon tue, la mitrailleuse ne fait que blesser. Ils ont appris officieusement que le canon serait supprimé sur les D.520 et m'ont demandé d'intervenir auprès du commandement pour que cette décision soit reportée. Je le fais volontiers, estimant que l'on doit tenir compte du jugement de trois pilotes ayant plusieurs victoires à leur actif.

Ce rapport, daté du 13 Juin, est significatif du contraste que le Dewoitine 520 institue avec ses prédécesseurs et que le témoignage suivant confirme. 

Ainsi, le Lt-colonel Michel Marias (grp III/3) exprime un véritable ouf de soulagement à l'arrivée du D. 520 : 
"Tant bien que mal, nous avons tenu avec nos Morane jusqu'au 24 mai, où nous sommes allés à Toulouse-Cazaux toucher des D520. Cette fois le moral remonta d'un coup. C'était un outil remarquable. L'impression que j'avais - que nous avions tous jusqu'alors - d'être des jouets à la merci de l'ennemi s'effaçait enfin. "

C'est proche de l'opinion de Marcel Albert (grp I/3 "les chats" puis, dans les FAFL, au fameux GC 3 / Normandie – Niemen où il terminera la guerre sur le front Russe avec 23 victoires homologuées) :  

"Le Dewoitine, avec ses quatre mitrailleuses et son canon, était un excellent chasseur et il y en avait à Toulouse, à Châteaudun, un peu partout, sauf dans les groupes.

Vaclav Cukr (Tchèque – grp II/3) est, lui aussi, soulagé. Il l'exprime ainsi : 

La situation est critique sur le front... Nous remercions le destin d'avoir reçu des Dewoitine 520. Toutes les fois que nous tombons sur les Allemands, ils sont deux ou trois fois plus nombreux que nous et ce n'est que grâce aux Dewoitine, ces avions de haute qualité, que nos pertes ne sont pas trop élevées...
Le même Vaclav Cukr souligne l’armement puissant et la solidité de cet avion en rapportant ce qui s'est passé après avoir descendu un Henschel 126 avec un de ses amis :"...Mais alors 5 Me 110 se ruent sur moi. Je ne sais pas ce qui se passe ensuite, mais je m'en tire sans blessure ; revenu à l'aérodrome, je compte 127 impacts de balles de mitrailleuses et 2 impacts d'obus de canons."

En ce qui concerne sa manœuvrabilité, une controverse s’est instaurée tardivement, après les rencontres de pilotes Vichystes avec les pilotes Anglo-Saxons. 

L’idée étant que les Français surestimaient la valeur de leur meilleur chasseur du moment - vu la déception engendrée par le bombardier Léo 451 et surtout par le chasseur MS 406 qui  avaient été très 
surestimés par le CEMA

{Source : Une grande partie des témoignages de pilotes que j'ai placés ici ont été publiés dans la revue Icare, dans la série des numéros sur la Chasse (54, 55,145, 156), au sein de la Bataille de France.}



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